Sommaire
- Editorial
- Lady Caithness, duchesse de Pomar
- De l’obsession à la subjugation
- Comment travaillait Edgar Cayce…
Editorial
La subjugation n’est pas une théorie spirite mais bien une réalité psychique provoquée par un être extérieur. L’exemple relaté dans ce bulletin date de trois mois tout au plus. S’il nous montre la fragilité de nos âmes au regard du monde spirituel, il nous démontre également que la solidarité d’un groupe et une moralité tournée vers le bien peuvent en venir à bout promptement pour reprendre un terme employé par l’un de nos guides suite à cette épreuve.
Edgar Cayce, lorsqu’il est en état de transe, par l’enseignement qu’il apporte dans ses ouvrages, rejoint la théorie des Esprits codifié par Allan Kardec quelques décennies plus tôt. Les relations avec le monde spirituel et les avantages que l’on peut en tirer ne sont jamais anodins. Le sachant, comme dans notre société matériel, a des devoirs et des obligations morales envers les autres, et que l’on s’adresse à des Esprits supérieurs ou à des forces manipulatrices, il y a toujours un engagement personnel qu’il faudra assumer par la suite.
Autre exemple à découvrir sur les conséquences des liens que nous pouvons tisser avec l’au-delà, celui de la Duchesse de Pomar, fervente défenseur du spiritisme mais que l’expérience fit évoluée vers plus de pondération et de sagesse.
Gilles Fernandez
Lady Caithness, duchesse de Pomar
Si elle se retrouve souvent citée dans de nombreux ouvrages théosophiques, ésotériques ou spirites, que ce soit sous le nom de Lady Caithness, sous celui de duchesse de Medina Pomar ou encore sous celui de Maria de Mariategui, ce n'est pas pour les livres qu'elle a écrit, bien qu'elle soit dotée d'une belle plume, ni pour ses capacités médiumniques, bien qu'elle soit un excellent médium. La duchesse doit principalement sa notoriété aux réceptions qu'elle organisait et qui permettaient la rencontre de tous ceux qui se réclamaient de spiritualité, quelle que soit leur conviction en ce domaine. C'est ainsi que l'influence de son salon lui permit de jouer un rôle très actif dans le mouvement spiritualiste de la fin du XIXème siècle.
Première partie de vie
Cette européenne avant l'heure nait, sous le nom de Maria de Mariategui, en février 1830 à Londres, d'un noble espagnol et d'une catholique anglaise qui était la petite fille du comte de Northampton. Les deux parents appartenant à des familles de la haute aristocratie, leur fortune était considérable.
Dès l'adolescence, elle est attirée par le mysticisme et s'adonne à l'étude de l'occulte. Riche, belle, intelligente et cultivée, de nombreux prétendants aspiraient à sa main mais c'est le général Condé de Médina Pomar, beaucoup plus âgé qu'elle, qu'elle choisit d'épouser en 1853. Un fils, Manuel, naît de leur union. Sa vie se déroule alors entre les milieux mondains madrilènes et ses domaines de la Havane où son mari possédait des plantations. Pendant quelques années, ce ne furent que fêtes et réceptions entre l'Espagne, Cuba et Paris.
A la mort du duc de Pomar, en 1868, elle se retire en Angleterre pour y suivre de près l'éducation de son fils, entré au collège des jésuites de Beaumont à Windsor. Elle y rencontre Lord Barrogil, James Sinclair, 14ème duc de Caithness, qu'elle épouse en secondes noces le 6 mars 1872.
Premières positions
C'est peu avant son second mariage, en 1871, que lors d'une enquête sur les phénomènes spirites, conduite par la London Dialectical Society, elle fait part d'un témoignage écrit qui est sa première prise de position publique sur le sujet et qui montre déjà l'influence des écrits d'Allan Kardec, en particulier sur la doctrine de la réincarnation qui est en général rejetée par les spirites anglo-saxons.
Son livre Old truths in a new light (Vérités anciennes sous un jour nouveau), paru en 1876, est le premier ouvrage important dans lequel elle expose sa vision personnelle de la tradition occulte. Proche de la pensée de Kardec, elle essaye de réconcilier théosophie, catholicisme et spiritisme. Elle approfondira encore ses convictions l'année suivante dans Serious letters to serious friends (Lettres sérieuses pour des amis sérieux).
Ses positions lui attirent les foudres du clergé anglais et espagnol. Il lui est gentiment conseillé de «laisser de côté ces choses qu'elle ne saurait comprendre et ses questions hors de sa compétence». Pourtant, Lady Caithness ne voulait pas empiéter sur les droits et privilèges du clergé mais simplement comprendre ce qui lui arrivait et que personne autour d'elle ne pouvait lui expliquer. Plus le clergé se montrait récalcitrant, plus Lady Caithness s'attachait à ses chères études et, comme elle était douée d'une médiumnité remarquable, les phénomènes spirites se manifestèrent dans toute leur puissance.
En 1876, elle s'affilie à la Société Théosophique, fondée l'année précédente à New York par Helena Blavatsky et le colonel Olcott et pousse son amie Anna Kingsford[1] à prendre la direction de la loge londonienne.
Mme Blavatsky, pendant un séjour chez Lady Caithness, approuve la création d'une branche française sous le nom de Société Théosophique d'Orient et d'Occident. La duchesse est ensuite considérée comme le successeur évident de Mme Blavatsky à la tête de la théosophie mondiale mais, au décès de cette dernière, c'est finalement Annie Bessant qui en prendra la direction.
La reine Marie Stuart
C'est en 1877 qu'a lieu l'évènement clé de sa vie spirituelle : sa rencontre avec l'Esprit de la reine Marie Stuart, décapitée pour cause de catholicisme en 1587, qui lui demande de se consacrer coeur et âme au progrès spirituel de l'humanité.
Elle décrira cette expérience dans une brochure intitulée A midnight visit to Holyrood (1884) où elle raconte qu'une nuit, dans le château de Caithness en Écosse, elle avait reçu en rêve la visite de la reine d'Écosse qui lui avait enjoint de se rendre immédiatement à la chapelle du château royal de Holyrood, ce qu'elle avait fait immédiatement, accompagnée d'un seul serviteur. Elle y avait eu une longue conversation avec la reine, qui avait conclu en l'embrassant sur le front et en se déclarant son ange gardien, à la suite de quoi Lady Caithness avait décidé de vouer sa vie à la spiritualité, comme il le lui avait été demandé : «Il y a plus de vingt ans que tu as été choisie pour faire partie du cercle du Christ parce que tu as une nature complète et bien équilibrée qui te permet de voir et de comprendre tous les côtés de la vérité.»
Les communications entre les deux femmes auront lieu par voie médiumnique des années durant, la reine apparaissant parfois sous forme visible comme l'attesteront, à différentes périodes, plusieurs témoins, parfois horrifiés. L'abbé J.A. Petit, qui a écrit une intéressante biographie de la Duchesse pour le livre Les pionniers du spiritisme, relate une de ses entrevues demeurée célèbre : «Le phénomène fut si réel qu'une dame, qui accompagnait lady Caithness, fut effrayée de voir paraitre l'ombre blanche de la reine, au moment où elle en plaisantait. Avant de quitter lady Caithness, l'apparition se pencha vers elle et lui posa sur le front un chaud baiser qui s'imprima sur la peau au point d'être encore visible le lendemain»
Plusieurs témoins ont pu attester également du délicieux parfum de rose qui annonçait la présence de la reine avant qu'elle ne se fut manifestée. Lady Caithness se considère désormais comme l'intercesseur terrestre de Marie Stuart, laquelle, devenue une entité des plus hautes sphères célestes, délivre depuis l'outre tombe des «vérités du jour nouveau qui doivent amener l'évolution de la race dans le sens d'une spiritualité plus haute.»
Certaines biographies laissent entendre que la duchesse se prenait pour la réincarnation de Marie Stuart mais c'est méconnaitre le spiritisme car, si cela avait été le cas, elle n'aurait pas cherché à converser avec elle pendant tant d'années. Par contre, il semble vrai que, petit à petit, la reine Marie Stuart occupa une place de plus en plus importante dans la vie de la duchesse qui lui vouait un véritable culte. Sur son papier à lettres, elle arborait les armes de la reine d’Écosse ainsi que sa devise «En ma fin est mon commencement». En 1891, elle commanda une statue de marbre de la reine d’Écosse qu'elle souhaitait offrir à la Ville de Paris mais, finalement, elle n'a pas du tout aimé le portrait de la reine qui en était fait et, de plus, la ville de Paris refusait d'installer sur une place publique une statue de la reine. Le modèle en plâtre de cette statue est toujours exposé au musée Bertrand de Chateauroux.
Quoi qu'il en soit, comme le dira l'abbé Petit, «Ces apparitions avaient pour but de pousser Lady Caithness dans sa voie et faire d'elle un apôtre de la cause spiritualiste[2].»
2ème veuvage et installation en France
Après la mort de son second mari, Lord Caithness, en 1881, elle s'installe définitivement en France où elle partage son temps entre son domicile parisien, d'abord rue de l'université puis dans un hôtel particulier qu'elle surnomme Holyrood (du nom du palais royal d'Edimbourg) et le palais Tiranty à Nice où elle participe à la vie mondaine hivernale. Sa mission prend alors une nouvelle ampleur.
A Paris, elle reçoit tous les mercredis du printemps à l'automne. Son hôtel particulier, au 124 rue de Wagram, constitue dès lors la plaque tournante, le lieu de rendez-vous de l'intelligentsia ésotérico-occultiste française. Puis l'hiver, elle se trouve à Nice où c'est le palais Tiranty qui se transforme en un des hauts lieux du spiritisme et de l'occultisme. Aux conférences hebdomadaires qu'elle organise s'expriment, entre autres, le médecin Charles Richet (1850-1935), élève de Charcot et analyste des phénomènes parapsychologiques, l'astronome Camille Flammarion (1842-1925), le spirite Léon Denis (1846-1927) ou Annie Bessant (1847-1933) future présidente de la société théosophique.
Léon Denis et la duchesse
Jean Prieur, dans son livre L'Europe des médiums et des initiés 1850 – 1950, parle des débuts d'orateur de Léon Denis chez la duchesse : «En 1892, Léon Denis reçut une invitation de la duchesse de Pomar qui le priait de donner des conférences en son hôtel d'Holyrood, situé avenue de Wagram. Jusqu'alors il n'avait parlé que devant des publics bourgeois et populaires et il appréhendait d'affronter un parterre de belles dames curieuses, d'hommes du monde moqueurs et de savants sceptiques. Il accepta cependant et se produisit chez la duchesse les 7 et 14 juin 1893.
Comme la presse de cette époque rendait compte des soirées mondaines et culturelles, voici ce qu'on pouvait lire dans le Journal : «Réunion des plus élégantes hier, chez la duchesse de Pomar, pour entendre la conférence de Léon Denis sur la doctrine spirite. D'une éloquence très littéraire, l'orateur a su charmer son nombreux auditoire en lui parlant de la destinée de l'âme qui peut, dit-il, se réincarner ici-bas jusqu'à épuration parfaite.(...)
La duchesse de Pomar avait fait de son hôtel, agréable pastiche d'un édifice du XVème siècle, un centre actif d'ésotérisme. Cette résidence somptueuse disposait d'un hall immense qui servait tantôt de salle de bal ou de concerts, tantôt de salle de conférences. Invités par elle, les auteurs en renom venaient éblouir un auditoire d'académiciens, de marquises, d'écrivains et d'esthètes»
Cette première étant un succès, Léon Denis sera de nouveau convié chez la duchesse, comme nous le raconte sa secrétaire, Claire Beaumard, dans son livre Léon Denis intime. Le passage se situe alors que Léon Denis évoque ces souvenirs parisiens avec ses invités : «Ils évoquèrent ensemble les curieuses réceptions de la duchesse de Pomar, au temps déjà lointain, où son bel hôtel de l'avenue Wagram était le rendez-vous de tous les esprits distingués, avides de pénétrer les arcanes des sciences psychiques. Nous avons retrouvé précisément ce billet daté du 13 avril 1894, et adressé par Lady Caithness, duchesse de Pomar, à Léon Denis :
«Cher Monsieur,
Par la carte incluse vous voyez que je dispose de vous selon votre promesse et j'approuve beaucoup le titre de la conférence que vous avez choisi ; les jours précédents étant déjà pris, il m'a été impossible de vous placer avant le 23 mai. Ce sera pour moi un grand plaisir de vous entendre de nouveau et je suis sûre que vous aurez un aussi grand succès que l'année dernière. Recevez tous mes remerciements et mes sentiments affectueux. Duchesse de Pomar.»
Une carte imprimée jointe à la lettre faisait connaître le nom des conférenciers conviés par la duchesse, nous y relevons les noms suivants et les sujets des conférences :
18 Avril 1894 - M. Camille Flammarion : Les étoiles et l'infini.
26 Avril - M. le Professeur Bonnet-Maury : Le Congrès des religions à Chicago.
2 Mai - Mme Hardinge Britten : Le spiritualisme moderne (en anglais).
9 Mai - M. le Professeur Ch. Richet : La Paix internationale.
18 Mai - M. Victor du Bled : La femme au XVIII° siècle.
23 Mai - M. Léon Denis : Le Problème de la vie et de la destinée.
30 Mai - M. l'abbé Petit : L'Esprit nouveau.
Léon Denis retournera régulièrement tenir des conférences chez la duchesse, comme en atteste l'extrait d'article suivant, tiré du journal parisien l’Événement, du 21 mars 1895 : «Orateur littéraire, armé d'une ardente conviction, Léon Denis a su vite conquérir l'auditoire mondain qui se pressait dans la salle des fêtes de l'hôtel de Pomar, et c'était un plaisir de voir cet essaim de belles dames de l'aristocratie parisienne, amusées au début par quelques pensées frivoles, modifiant peu à peu l'expression de leurs regards pour devenir graves et montrer une attentive fixité »
L'Aurore du jour nouveau
En 1886, à l'approche du troisième centenaire de l'exécution de Marie Stuart, lady Caithness fonde une revue, dédiée à l'étude des spiritualités, sous le titre L'Aurore du jour nouveau. La revue qui reflète l'éclectisme de ses convictions religieuses, mélange de catholicisme, de théosophie, de bouddhisme, de spiritisme et de protestantisme «avait surtout pour objet de mettre le public spirite français au courant de ce qui se publiait de plus intéressant à l'étranger. A côté des enseignements théosophiques figurent des communications spirites de la plus haute importance et qu'on chercherait vainement ailleurs. Les articles théosophiques et spirites dus à la plume de Lady Caithness furent plus tard réunis en volumes[3].» La revue dura jusqu'en 1895, année de la mort de Lady Caithness.
Spiritisme expérimental
Malgré l'influence des idées théosophiques, son intérêt pour le spiritisme et pour les communications médiumniques ne se démentit pas. Jusqu'à la fin de sa vie, des séances spirites se tiennent régulièrement chez elle et lui donnent l'occasion de connaitre les médiums les plus en renom et d'être ainsi témoin d'une multitude de faits qui la poussèrent, avec l'âge et l'expérience, à devenir de plus en plus prudente. On le saurait à moins si l'on en croit l'Abbé Petit qui, dans les Pionniers du spiritisme cite, tour à tour, l'apparition de formes abjectes ou effrayantes matérialisées en compagnie du médium Home, des élémentaux qui s'attachent au docteur Hartman au point de lui faire perdre tout repos, des poulpes fluidiques qui donnent à la duchesse la sensation d'étouffer, du jour où elle s'est trouvée projetée hors de son lit tel un paquet de linge, etc.
A ces réunions, participe le physiologiste Charles Richet, futur lauréat du prix Nobel de physiologie et de médecine, soutenu financièrement, depuis le début des années 1890, par la duchesse de Pomar pour la création de la branche française de la Society for Psychical Research, association fondée en 1882 afin d'étudier de façon scientifique les apparitions de fantômes et de poltergeists ainsi que tous les phénomènes paranormaux (télépathie, mesmérisme, clairvoyance...). Depuis sa fondation, la Society compte parmi ses membres des personnalités aussi diverses qu'Arthur Conan Doyle, Henri Bergson, l'astronome Camille Flammarion, le chimiste William Crookes et le naturaliste Alfred Russel Wallace. Bon nombre de communications proviennent d'un mystérieux «cercle de l'étoile» composé en grande partie d'Esprits désincarnés parmi lesquels figure bien sûr Marie Stuart mais aussi Jeanne d'Arc. Leur but est de créer, par l'union des forces spirituelles et des forces terrestres, un grand centre de puissance au moyen duquel les Esprits incarnés les plus avancés deviendraient les précurseurs d'un ordre de choses nouveau et plus élevé sur cette terre. La mission de Lady Caithness est de répandre ces révélations pour saturer l'atmosphère du monde de ces pensées vraies. Il est à noter que lady Caithness partagera avec Charles Fauvely et Eugène Nus la présidence d'honneur du congrès spirite de 1889.
Témoignage de l'abbé Petit sur le phénomène de télépathie
Peut-être parce que, comme nous l'avons vu, Lady Caithnes avait pu apprécier elle-même le côté dangereux d'un spiritisme grossier nourrit par une curiosité malsaine, elle s'est surtout attachée, vers la fin de sa vie, aux phénomènes de télépathie où elle obtenait des résultats très appréciables, comme en témoigne l'Abbé Petit, dans Les Pionniers du spiritisme : «Un autre jour, dans une réunion intime, devant une cinquantaine de personnes, je fus pour ainsi dire forcé de prendre la parole. On y mit tant d'insistances que, malgré mes refus réitérés, je dus céder. Je fus pitoyable, au dessous de ce que vous pouvez imaginer. J'étais assis à la gauche de la duchesse, sur le même canapé. Tout à coup, je me mets à parler sur un sujet auquel je n'avais jamais pensé. Les idées sont nettes, l'expression choisie, la phrase se déroule élégamment et tombe bien sur ses pieds ; il y avait même un souffle d'éloquence ; l'auditoire était littéralement suspendu à mes lèvres, tant les choses que je disais étaient à la fois sublimes et nouvelles. J'étais le premier à m'étonner et des belles choses que je disais et de la manière dont je m'exprimais. Quand j'eus terminé et pendant que l'on se communiquait mutuellement ses impressions, la duchesse fit un signe à Mme de Morsier et l'envoya chercher quelques feuilles de papier dans son bureau. Elle commença à donner lecture en anglais de ce qui y était écrit. «Mais, c'est ce que vient de nous dire l'abbé» interrompirent plusieurs personnes. On crut à quelque connivence entre nous. Pas du tout mais en me voyant si misérable, si embarrassé, la duchesse avait projeté sa pensée sur moi et j'avais récité en français ce qu'elle avait écrit en anglais deux ou trois jours auparavant. J'ignorais qu'elle eût traité ce sujet et mon étonnement surpassa celui des auditeurs. »
Témoignage de l'exploratrice Alexandra David-Néel
La célèbre exploratrice Alexandra David-Néel a, elle aussi, témoigné dans son livre Le sortilège du mystère des séances de spiritisme qui étaient organisées dans la Chapelle du Palais devant un portrait en pied de la reine et auxquelles elle assistait du printemps à l'automne tous les mercredis. La jeune Alexandra qui cherchait à réfléchir sur le chaos de son propre esprit, à acquérir la connaissance spirituelle et s'efforcer de trouver la vérité prenait plaisir à aller discuter avec Mme Caithness de la religion sagesse et du bouddhisme ésotérique. Elle raconte : «Elle habitait un très vaste et somptueux hôtel, remarquable par un escalier monumental en marbre rose. La maîtresse du logis recevait dans une chambre à coucher dont le plafond peint représentait le Cercle de l'étoile, c'est à dire plusieurs centaines de figures de bienheureux et d'anges disposés en rangées concentriques autour d'une étoile d'or.(...) Le jour de la maîtresse de maison l'on discutait dans cette chambre de théories occultes et de recettes d'alchimie mais, surtout de l'évocation des Esprits. La duchesse et ceux qu'elle recevait étaient tous des adeptes du spiritisme.»
Lors de ces séances, l'exploratrice croise Camille Flammarion, attablé avec une douzaine d'autres personnes dans la chapelle faiblement éclairée. «Les Esprits qui se manifestent dans des séances des spirites sont des élémentaires, des âmes désincarnées plus ou moins longtemps conscientes. Elles sont plus ou moins intelligentes, souvent hébétées aussi, par l'état inconfortable que leur créent leur manque d'enveloppe matérielle et l'impossibilité où elles se trouvent, faute d'organes sensoriels, de participer encore à l'activité du monde auquel elles ont appartenu. Ces élémentaires cherchent activement les occasions de se réincarner et de nouer avec les vivants des relations propres à leur faciliter cette réincarnation. Or, à défaut de celle-ci, ces entités tendent à occuper temporairement les individus incapables de s'opposer à leur emprise ou ceux qui la subissent volontairement. De là, les phénomènes de possession et de médiumnité...»
Fin de vie
Alors que les investigations télépathiques de l'abbé Petit et de la duchesse progressaient, l'évêque de Beauvais défendit à l'abbé de remettre les pieds chez la duchesse sous peine d'interdit et l'abbé ne put, à son grand regret, que s'incliner. La duchesse décède à Paris le 2 novembre 1895 d'une crise d'asthme.
A l'occasion de sa mort, on se rappellera «le charme unique de ces réceptions où elle aimait à opposer, à rapprocher et à grouper les esprits les plus divers, où des brahmanes et des bouddhistes causaient avec des femmes de l'aristocratie anglaise et française, où des prêtres catholiques, des pasteurs protestants et des rabbins discutaient ensemble sans animosité, et s'étonnaient parfois de s'entendre comme des frères.»
Aussi, on retiendra que bien peu de gens ont su, comme elle, mettre à la fois leur fortune et leur intelligence au service d'une cause spirituelle, en ne cherchant jamais à opposer mais, bien au contraire, à analyser et à comprendre dans le but de réconcilier, réunir et faire progresser chacun afin que par l'élévation commune de leur âme, tous sur Terre puissent en profiter.
Qu'elle en soit ici remerciée...
De l’obsession à la subjugation
Avec l’avènement du spiritisme, on a pu démontrer, cataloguer, étudier et expliquer de nombreux faits de la vie psychique jusqu’alors insondables. La médiumnité est un don inhérent à tous les êtres, comme la faculté de respirer et chacun assimile les forces supérieures ou inférieures qu’il contacte.
Dans Le Livre des Médiums d’Allan Kardec, il est expliqué que le périsprit est une enveloppe fluidique, semi-matérielle, qui sert de liaison entre l’âme et le corps. C’est aussi un agent qui permet tout échange entre les êtres incarnés ou désincarnés. C’est par ce biais qu’ils se communiquent soit indirectement par notre corps, soit directement par notre âme. D’après la définition d’Allan Kardec, dans ce même ouvrage, au chapitre XXIII : «l’obsession est la domination que certains Esprits réussissent à avoir sur certaines personnes». Cela peut aller de la simple obsession, puis à la fascination et à la subjugation.
Dans le cas de l’obsession simple, la personne est poursuivie, avec ténacité, par un Esprit dont elle n’arrive pas à se débarrasser. Des réactions physiques peuvent se produire telles que des coups, des sons. La fascination est une illusion produite par l’action directe de l’Esprit sur la pensée de l’individu et qui paralyse son raisonnement. Dans ce cas-là, le persécuteur possède l’art de la dissimulation ; il est rusé, menteur et profondément hypocrite. Dans la subjugation, nous avons un niveau avancé d’obsession, l’entrave est si forte qu’il y a une substitution partielle ou non d’un Esprit errant à un incarné. Nous retrouvons des informations complémentaires dans le Livre des Esprits du même auteur à la question 473, il est demandé : Un Esprit peut-il momentanément revêtir l'enveloppe d'une personne vivante, c'est-à-dire s'introduire dans un corps animé et agir au lieu et place de celui qui s'y trouve incarné ?
On lui répond : L'Esprit n'entre pas dans un corps comme tu entres dans une maison ; il s'assimile avec un Esprit incarné qui a les mêmes défauts et les mêmes qualités pour agir conjointement ; mais c'est toujours l'Esprit incarné qui agit comme il veut sur la matière dont il est revêtu. Un Esprit ne peut se substituer à celui qui est incarné, car l'Esprit et le corps sont liés jusqu'au temps marqué pour le terme de l'existence matérielle.
Allan Kardec demande ensuite la précision suivante : S'il n'y a pas possession proprement dite, c'est-à-dire cohabitation de deux Esprits dans le même corps, l'âme peut-elle se trouver dans la dépendance d'un autre Esprit, de manière à en être subjuguée ou obsédée, au point que sa volonté en soit en quelque sorte paralysée ?
L’Esprit instructeur lui répond : Oui, et ce sont là les vrais possédés mais sache bien que cette domination ne se fait jamais sans la participation de celui qui la subit, soit par sa faiblesse, soit par son désir. On a souvent pris pour des possédés des épileptiques ou des fous qui avaient plus besoin de médecin que d'exorcisme.
Pourquoi faut-il veiller ?
«Pour ne pas tomber dans la tentation» explique Jésus, c’est-à-dire afin de ne pas céder à l'incitation de ceux qui nous poussent à faire du mal ou pour lutter contre nos mauvais penchants. Il faut donc être vigilant vis à vis de nous-mêmes et de son prochain, le but n’étant pas d’analyser et de critiquer, il faut juste éviter l’erreur ou la corriger. Il faut être attentif pour ne pas établir de syntonie mentale ou d’affinité fluidique avec des Esprits inférieurs, incarnés ou pas, puis comprendre tout ce qui nous lie à la vie terrestre, pour développer et perfectionner ce qui est juste, pour le plus grand bien de tous.
Pour illustrer nos propos, voici un exemple :
La subjugation est un des états de l’obsession étudié par les spirites de façon théorique. Malgré leurs connaissances de nombreux médiums se laissent manipuler par ces Esprits obsesseurs, parfois très intelligents et capables d’utiliser les différents fluides ambiants. La malignité de certains Esprits et leur parfaite connaissance de notre monde matériel leur permettent de s’insérer dans nos vies de façon malicieuse, et cela même si l’individu est animé de bonnes intentions. Personne n’est à l’abri de ce danger. La capacité de compréhension et de réaction de l’obsédé est alors primordiale.
Cette histoire débute au XIXème siècle, avec deux médiums liés par une vie antérieure, dans laquelle elles auraient participé, en toute confiance, à des expériences spirites sous l’accompagnement d’un personnage voulant à tout prix prouver par l’étude des phénomènes la survivance de l’âme. Mais les preuves étaient toujours insuffisantes à son regard. Les maladresses commises à cette époque engendrent aujourd’hui des dérèglements fluidiques sur les deux médiums. Les recherches reprises dans cette vie avec une intention de progrès moral et d’aide à son prochain éveillent chaque fois qu’il y a des progrès conséquents et l’apport d’une masse fluidique importante, l’attention d’Esprits du bas astral. Ces interventions provoquent immanquablement discordes et disputes au sein même du centre spirite. Malgré les protections dont chacun d’entre nous dispose, il y a toujours dans l’ombre des êtres qui épient le monde matériel et ceux qui aspirent à de plus amples connaissances du monde invisible. Il en découle toujours des désagréments, dont seuls ceux qui effectuent une démarche spirituelle louable, peuvent en sortir grandis grâce à l’aide d’Esprits bienveillants, .
Ces deux médiums se retrouvent donc dans cette vie avec une sensibilité accrue aux influences extérieures et notamment à des influences fluidiques invisibles et multiples. Au fil des années, ces fluides se sont mis à agir en inter-connexion sur leurs organismes physiques comme sur deux sœurs jumelles. Un afflux fluidique sur l’une provoque un symptôme comparable sur l’autre. Une attaque d’Esprits souffrants sur la première ne manque pas de perturber la deuxième. Certains Esprits ayant compris cette relation s’en jouent pour les affaiblir dans leur recherche de compréhension du phénomène.
C’est ainsi que récemment une offensive d’Esprits malveillants a provoqué fièvres et délires chez la première pendant plus de huit jours. La température montait à plus de quarante degrés sans qu’aucun médicament ne soit efficace pour la faire descendre, de nombreuses douleurs parcouraient tout son corps, et ses nuits d’insomnies lui amenaient d’horribles visions.
Une première réponse de ce phénomène nous a été donnée au cours de l’une de nos réunions : «Le plan physique a absorbé une masse considérable de nos fluides que nous mettons en place pour vos travaux, suite à vos demandes et à vos souhaits. L’aide spirituelle est bien là, autour de vous, chacun l’absorbe selon ses capacités, sa volonté, mais elle se met en place avec plus ou moins d’affinité et de résultats heureux. Il faut constater que la matière physique s’accorde difficilement avec nos fluides. L’enfant passe bien par des étapes pour apprendre, il en est de même pour vous si vous voulez comprendre pour grandir. Cela fait partie de votre engagement».
C’est ainsi que des Esprits malveillants, attirés par des masses fluidiques colossales dont ils se nourrissent, profitent de ces troubles sur le corps physique du médium pour se rapprocher et provoquer des maux multiples afin d’anéantir progressivement sa volonté. Dès lors, sans réaction consciente il devient une proie facile à influencer. Ces fluides appelés au cours des réunions afin d’établir un contact, lorsqu’ils ne sont pas parfaitement maîtrisés, peuvent surgir à tout moment et favoriser l’approche de toute sorte d’Esprits. A la question posée à nos guides : «Ces fortes fièvres ne sont-elles pas dangereuses pour l’organisme humain ?» Il a été répondu : «Nous veillons, tu as pu constater qu’elle n’a jamais été perdue ni perturbée par aucun de ceux qui cherchent ces fluides qui régénèrent».
Avec l’aide de prières et de dialogues avec sa sœur de fluides, et après de longues journées et d’interminables nuits d’errance et de souffrance la première sort du combat, lasse et affaiblie pour plusieurs semaines.
C’est alors que la deuxième, réagissant comme le feraient des vases communiquant tombe malade à son tour, et subit les mêmes effets. Fiévre et souffrance terrassent sa volonté, de nombreux frères en souffrance peuplent ses nuits de cauchemars. Sa sensibilité accrue elle perçoit de toute part les voix de ses persécuteurs sans pouvoir se raccrocher, au milieu de ce brouhaha, à celle réconfortante de son guide. Quand elle croit reprendre pied c’est pour mieux s’enfoncer. Et de surcroit une vraie bronchite infectieuse vient épuiser son organisme. Affaiblie par cette lutte intense, sa volonté brisée, elle se laisse envahir insidieusement par l’instigateur de tous ces méfaits. Tapi dans l’ombre du seuil, il espionne depuis plusieurs années attendant son heure pour semer la discorde. Progressivement, il s’est inséré dans les pensées du médium et lui vante les pouvoirs qu’elle pourrait conquérir rapidement grâce à son aide. Il relate des faits précis, lui montre un chemin par lequel son apprentissage serait bien plus rapide, sa médiumnité plus performante. Ses conseils sont explicites, ses prédictions justes, mais dans son discours il lui manque une valeur morale fondamentale : la bienveillance pour autrui.
Dans son for intérieur, elle reste attachée aux valeurs du bien acquises grâce aux conseils de nos guides, mais le sournois beau parleur lui apporte des réponses pertinentes à des questions concernant sa progression. C’est par tout ce cheminement qu’une forme de subjugation s’est mise en place. Le médium alterne les périodes de brève lucidité et de délire. La réalité de notre monde lui échappe, elle n’en a pas toujours conscience et j’ai l’impression qu’elle perd la raison et se dirige vers une sorte de folie. Pour se libérer, elle me parle de ce qu’elle voit, de ce qu’elle entend, de ce qu’elle subit en simple spectateur, ne sachant plus quelle direction prendre ni qui elle est réellement. Le subjugueur veut l’emmener insidieusement à accepter son pacte, il veut la guider en échange d’une puissante faculté médiumnique. Le médium garde malgré tout une étincelle de conscience et m’explique plusieurs fois par jour ses visions, ses ressentis, ses voix. Tout ce qu’elle me dit me permet de mieux cerner la situation dans laquelle elle se trouve.
Je lui conseille, dans un premier temps, de couper toute communication par la suppression des fluides nécessaires à ce travail. Je m’aperçois que la tentation est grande d’utiliser les recommandations données par cet Esprit pour notre progression dans nos recherches sur les fluides et j’en comprends le danger. Je sais que le perfide nous écoute, j’informe le médium de la manœuvre et lui demande d’oublier tous les conseils, tout l’enseignement donné par cet Esprit. Nous ne devons rien retenir, rien utiliser de ce qu’il a pu dire, il faut tout oublier. Le chemin de l’apprentissage sera bien plus long mais il sera acquis pas à pas, dans les efforts de chaque jour, de chaque réunion, dans l’humilité de ne pas comprendre tout de suite l’enseignement de nos frères supérieurs, et dans l’amour de notre prochain. A compter de cette décision, le subjugueur d’abord en colère va progressivement perdre de l’emprise sur le médium dont la volonté devient plus forte chaque jour. Il faudra encore une dizaine de jours de vigilance pour que l’emprise se dissipe laissant le médium dans un état de grande fatigue. Mais il faudra rester vigilant car sa présence se fera sentir encore durant plusieurs semaines.
J’entends souvent cette question : pourquoi vos guides ne vous ont-ils pas protégé ? Par cette épreuve, c’est tout notre centre qui en sort grandi par l’exemple donné. Nous sommes restés unis, soudés à la recherche de la solution. Nos amis de l’invisible restaient présents, m’inspirant de leurs conseils et regardant quel chemin nous allions suivre. Au fil des mois précédant ce péril nous avons été abreuvés de leur conseil de sagesse, nous demandant d’être patient dans notre démarche et que la lumière viendrait en son temps. Je les remercie de la confiance qu’ils ont mise en notre groupe.
Nous avons laissé la parole au subjugué :
Cela fait déjà deux semaines que je n’arrive pas à dormir plus de deux heures par nuit mais comme j’ai une bonne bronchite, je ne suis pas vraiment inquiète. Dans la journée, je me repose, je dors parfois une heure mais pas plus. Je ressens beaucoup de fluides, cela m’aide. Je suis juste fatiguée comme toute personne qui est bien enrhumée. Nous voici à la troisième semaine, je tousse moins, je n’ai plus de fièvre, la bronchite est terminée. Je n’arrive toujours pas à dormir correctement, je ressens des présences autour de moi. Je ne suis pas apeurée, j’ai l’habitude, j’entends souvent des Esprits qui me parlent, j’en vois aussi. Cependant, là, c’est différent, ils me parlent tout le temps. Ils sont quatre ou cinq, ils n’arrêtent pas. Certains partent, d’autres arrivent. Ces Esprits sont assez gentils, ils ne parlent pas très forts, ils ne me bousculent pas. Dès que je pense à quelque chose ou à quelqu’un, ils ont chacun un avis. Je n’arrive pas à arrêter leurs discours. Le jour, la nuit, cela continue. Comme j’ai décidé de ne pas prendre de médicaments pour dormir, je me force à trouver le sommeil : je me vide de toute pensée et je cherche le sommeil du corps. Rien n’y fait, je suis pourtant patiente. Je recommence tranquillement afin de poser ma pensée et de dormir mais les discours reprennent et des fluides en quantité arrivent. Je sens une force vive en moi. Sur le matin, autour des cinq heures, le sommeil me gagne et j’arrive à dormir jusqu’à sept heures puis la journée commence, je ne suis pas fatiguée, je sens toujours ces fluides, c’est comme une énergie qui me gagne partout.
Les jours passent, je commence à m’inquiéter et à trouver les nuits longues à entendre sans cesse des Esprits, ils passent autour de moi, cela fait des ombres sombres. Je n’ai pas peur mais une terreur me gagne. Je ne sais pas pourquoi. J’ai l’impression de perdre pied, il me semble que je suis minuscule dans mon corps et je ne suis plus sûre de qui je suis maintenant. Ces Esprits, je les distingue bien, certains semblent perdus, certains sont morts dans des guerres en Afrique, ils cherchent leurs parents. Ils sont souvent assez jeunes. Je peux encore leur parler et leur demander s’ils ont besoin d’aide. Je prie pour eux mais ils sont tellement nombreux. Au bout d’un certain temps, ces Esprits disparaissent et je finis par discerner un Esprit plus âgé, de type européen, il est posé et a une bonne connaissance des fluides. Il me parle tranquillement, il m’explique tes tas de choses. Avec lui, je vois très bien. Quand je lis un article dans un livre ou dans le journal, il peut me parler du contexte, de la personne qui a fait l’article, des sentiments qui l’animent. Tout arrive très vite, bien plus vite qu’avec mon guide. En trois secondes, j’ai déjà tout compris, tout est clair et simple. Au début, je suis un peu étonnée, puis après au fil de la journée, je suis un peu agacée de ne plus pouvoir réfléchir et d’avoir toute solution à tout. Le discours n’est jamais violent, il est toujours tranquille avec une constance dans le jugement car il y a toujours un jugement dans son propos. Je comprends alors qu’il manque de bienveillance envers son prochain, l’excuse de la faute, de l’erreur, le pardon. Je lis La Vigne de la lumière d’Emmanuel pour me soutenir dans mon raisonnement.
Je pense avoir trouvé. L’Esprit est toujours là, il ne me répond pas, il ne me donne plus d’avis. Il me parle de ma médiumnité, du travail à faire, de ce qui va se passer dans l’avenir. Tout se déroule devant mes yeux cohérents. Je suis à la fois attirée par ses projets mais j’aime les rencontres simples avec mon guide. L’Esprit me montre des changements mais il ne m’intéresse pas, je ne veux pas être le médium qu’il aimerait, je veux simplement être moi.
C’est une lutte, je n’entends plus du tout mon guide, l’Esprit est toujours calme, il m’apporte toujours des fluides pour tenir même si je ne dors plus la nuit et c’est la quatrième semaine. Maintenant, je ne sais plus où je suis, où j’en suis, je parle de moi à la troisième personne et là, dans cet état, il n’y a plus que l’aide des médiums du centre pour me sortir de cette subjugation que je n’ai pas vu arriver. La prière va m’aider mais il faut maintenant me donner des mots à dire car ils n’ont plus de sens pour moi. Je suis perdue, noyée dans les fluides de l’Esprit et je ne sais plus ce qu’il faut faire. Je m’accroche comme une désespérée à ce que j’ai appris par la doctrine spirite, l’amour de son prochain, le respect de l’autre.
Comment travaillait Edgar Cayce…
Nous sommes en 1936, aux États-Unis, en pleine dépression économique. Un petit groupe d'amis de Cayce, qui s'intitule pompeusement le «Comité de recherche économique», a décidé de consulter le voyant sur la façon dont ils doivent diriger leurs affaires.
Cayce enlève ses chaussures et sa cravate, s'allonge sur son divan – sa femme Gertrude guette la seconde où il va plonger dans le sommeil. À cet instant précis, elle attaque : «Vous avez devant vous certains membres du comité de recherche économique, présents dans cette pièce. Ils voudraient, à travers ce canal d'information (Edgar Cayce endormi), être périodiquement éclairés sur la tendance générale de la crise économique que nous traversons, et sur les divers courants de pensées et d'action, tant ici qu'à l'étranger. Vous voudrez bien analyser plus particulièrement les répercussions de cette tendance générale sur la vie des particuliers de notre pays.»
Edgar, d'une voix méconnaissable, répond : «Oui, nous avons sous les yeux la requête des personnes présentes qui désirent être informées de la crise.»
On notera qu'il dit «nous», sous entendant qu'il répond «avec» quelqu'un d'autre, invisible mais présent.
«L'approche d'un tel sujet, à travers ce canal d'information, doit commencer par une réflexion sur la nature même de cette information et chacun doit s'interroger sur la façon dont celle-ci peut l'aider personnellement dans sa vie quotidienne.»
Cayce emploie partout ce mot «canal» (en anglais «channel»). Il considère que le voyant, comme le guérisseur, n'a qu'une chose à faire : se purifier avant de devenir un parfait «canal» pour laisser couler les énergies divines. Grâce à quoi, il pourra transmettre la connaissance et la santé à ceux qui se branchent sur ce canal.
«Une telle requête, donc, ne devrait être faite qu'après mûre réflexion. Ceci, non seulement à cause du caractère particulier de cette information qui pourra être transmise régulièrement, mais également pour chaque demandeur à titre particulier, parce qu'elle représente une grande obligation morale.»
Cayce souligne la responsabilité de ceux qui savent et n'utilisent pas leur savoir.
«Car pour celui qui sait et n'agit pas, la connaissance devient péché.» Péché capital... qui pourtant ne figure pas dans la liste classique des sept péchés capitaux. L'avertissement s'adresse également au lecteur de ce livre.
«Donc, dans cette perspective, chacune des personnes ici présentes devra soupeser attentivement ses motivations. Cherche-t-elle seulement une information à sensation, sans avoir vraiment réfléchi à ce qu'une telle information lui apporte à titre personnel ? Cherche-t-elle à utiliser à son profit ce que reçoivent tous ceux qui cherchent sincèrement ?»
Cayce, qui connait bien son monde, interroge ses questionneurs sur la pureté de leurs motivations. Ont-ils vraiment l'intention d'utiliser la voyance de Cayce pour le bien général ? Il faut croire que certains avaient dû nourrir quelques arrières-pensées... par exemple, utiliser, - oh, en toute innocence... - ces renseignements «psi» pour arrondir un peu leur caisse de dollars ? Vendre ces tuyaux à la presse, les utiliser en bourse ?
«Car, suivant l'antique tradition, ceux qui se mettent sur le rang doivent choisir : ou servir les puissants, ou servir le bien général de l'humanité.»
Le choix se pose à tous...
«Ceux qui sont venus ici chercher l'information doivent d'abord réfléchir. Ensuite, il y a une autre question : comment cette information devra-t-elle être donnée, de la façon la plus utile au chercheur ? La plus porteuse d'espoir ?»
(...) Par delà ses interlocuteurs immédiats, Cayce s'adresse à nous. Dans les temps très difficiles qui viennent, il souhaite que les informations données dans ce livre puissent être utiles à nos lecteurs. Et non seulement à nos lecteurs, mais à leurs proches – ou à «leur prochain» comme dit Cayce.
«Une telle information devra donc être donnée à ceux qui cherchent avec sincérité au sein de cette association – ou dans n'importe quelle autre qui, avec ses propres méthodes de recherche, reste honnête.»
L'association en question, c'est l'ARE, fondée par Cayce lui-même. Mais il n'est jamais sectaire, il ne joue jamais les gourous terroristes. Ceux qui cherchent au sein d'autres associations honnêtes une information sérieuse, dit-il, sont tout aussi dignes de la recevoir, quelle que soit leur étiquette, leur religion, ou leur race.
«Mais, en transmettant, il faudra toujours y ajouter une mise en garde : celui qui l'utiliserait à son profit égoïste courrait à sa ruine.»
La mise en garde s'adresse à nous tous, vous et moi !
«Passons aux questions.»
«Voudriez-vous expliquer d'où viennent ces informations ? De quelle source ?»
Autrement dit, Gertrude Cayce voudrait faire expliquer à son mari d'où il tire ses «lectures» et par quel mécanisme il peut répondre avec exactitude à toutes ces questions qui lui sont posées : médecine, psychologie, histoire, physique, chimie, astronomie, astrologie, politique, économie, art... Une bibliothèque n'y suffirait pas !
À la question de sa femme : «D'où tire-t-il toutes ses connaissances ?», il va décrire ce que la tradition occidentale appelait «le Livre de la vie» ou «la mémoire de l'Univers» et les indiens «l'Akasha»
«Les situations, les activités, les pensées des hommes sous tous les climats sont des réalités objectives, car la pensée est une réalité objective. Tout ce qui existe s'imprime sur l'écran du temps et de l'espace et, à mesure que se déroulent les évènements, ils y sont enregistrés.»
C'est la définition des «dossiers akashiques» que connaissent et décrivent tous les mystiques de toujours, tous les ésotéristes et la Bible elle-même.
«Ce sont ces enregistrements qui peuvent être lus par ceux qui sont capables de se brancher dessus. C'est comme la radio, ou n'importe quelle transmission par ondes : tout s''imprime sur les ondes de la lumière, sur les ondes qui traversent l'espace. Et les instruments conçus pour capter ces ondes peuvent retransmettre ce qui est émis.»
Autrement dit, Cayce estime, comme tous les grands voyants, que notre monde n'est que la concrétisation des schémas créés dans le monde invisible. Le Maître Philippe (de Lyon) les appelait des «clichés» : tout ce qui se réalise sur la Terre a d'abord existé dans l'invisible et ensuite, après matérialisation terrestre, laisse en retour sa trace «historique» dans les dossiers akashiques. Un jour, le Maître Philippe fit revivre, sous les yeux de ses auditeurs, la bataille de Waterloo qui s'était déroulée presque un siècle auparavant. (...)
Selon Cayce, la réincarnation de groupe est la clé des évènements historiques.
«Donc, lorsque vous recherchez ces informations, ne vous laissez pas troubler. Les divergences d'interprétation sur les causes de la situation économique sont créées par la pensée et l'activité des uns et des autres, comme les programmes divers qui peuvent être émis sur n'importe quel sujet.»
C'est à dire qu'un évènement, ou une activité, quels qu'ils soient, peuvent être interprétés différemment par différentes stations radio qui, dans leurs programmes, le présenteront en fonction de leur ligne de pensée, sous des angles très différents.
Sur la crise économique, qui était la grande préoccupation, le grand sujet de conversation d'alors, les amis de Cayce reçurent une interprétation qui avait de quoi surprendre.
«Le monde extérieur est seulement l'une des activités du monde invisible.»
Autrement dit, la matière, le monde matériel, celui que nous voyons par la fenêtre est entièrement sous le contrôle du monde invisible dont il est la projection. Les lectures étant toujours demandées par quelqu'un, le groupe veut savoir comment aider Cayce à obtenir les meilleurs renseignements (tirés de l'Akasha) en posant les bonnes questions : ils se sont aperçus que, lorsque leurs questions étaient embrouillées, Cayce répondait d'une façon obscure – ou pas du tout ! - car il donnait son enseignement uniquement sous forme de dialogue (c'était aussi le principe de Socrate). Cayce endormi pouvait répondre à tout. Encore fallait-il qu'on lui pose la bonne question !... (...)
La question d'un dialogue dépend bien entendu des deux interlocuteurs : à la radio, ou à la télévision, on donne une meilleure prestation lorsque l'on est interviewé par un journaliste qui connait son métier ! C'est le sens de la question suivante, posée par Gertrude : «Pour établir le meilleur contact possible (avec l'Akasha), quelle est la meilleure forme de suggestion à donner (à Cayce endormi) ?»
«Cela dépend de cette source (d'information), de la station (émettrice) et de la nature de ce qui doit être expliqué (par Cayce).»
Et, comme le souci de ses interlocuteurs est d'obtenir des informations économico-politiques, Cayce élargit sa réponse : il n'est pas le seul à pouvoir être considéré comme une «antenne» ; les dirigeants d'un pays le sont aussi.
«Car cela se passe comme on vous l'a déjà dit : la conscience collective de tel ou tel élément, de tel ou tel pays, les dirigeants d'un pays, c'est à dire le groupe le plus influent de telle ou telle nation, se comportent comme une unité et comme une station radio. Ils sont simplement le contact de cette nation avec la conscience universelle. Et c'est pareil qu'il s'agisse de l'Amérique, du Canada, de l'Angleterre, de l'Italie, de la France, du Japon, etc.»
«À quelle fréquence devront être données ces lectures (sur l'économie et la politique) ?»
«Si ce groupe les utilise comme il faut, la fréquence peut en être modifiée, selon que le besoin s'en fait sentir.»
Et, pour être sûr que ses auditeurs ont bien compris l'avertissement important qui a été donné plus haut, il le répète : «Car pour celui qui sait et n'agit pas concrètement, cette information devient une pierre d'achoppement.»
Il sollicite ensuite la réflexion de ses auditeurs sur le destin de l'Amérique, dont il va beaucoup parler (dans la suite de cette lecture).
«Quelle interprétation donnez-vous, quelle lecture faites-vous des évènements qui ont poussé ce pays à se séparer (de la mère patrie[5]), et qu'est ce qui a poussé ce pays à s'engager dans les affaires mondiales ? Qu'est-ce qui l'a amené à cela ? Et qu'est-ce qui a amené les citoyens à s'associer pour agir ?»
[1] Anna Kingsford (1846–1888) militante féministe, écrivain, théosophe, spiritualiste et hermétiste anglaise. Elle fut une des premières anglaises à obtenir un doctorat en médecine et s'engagea également pour le végétarisme et contre la vivisection.
[2]Les pionniers du spiritisme, page 81.
[3]Les pionniers du spiritisme, page 83.
[4]Début de la Lecture 3976-16, le 18 avril 1936.
[5] Les États-Unis, qui se sont séparés de l'Angleterre dont ils étaient une colonie, lors de la guerre d'Indépendance, à la fin du XVIIIè siècle.