Ce mois-ci, nous vous présentons Jean Meyer. Extrait de la Revue Spirite de juillet 1955, voici en quelques lignes, quelques traits saillants de ce spirite qui apporta son aide à la doctrine.
Homme d’ouverture, il contribua par sa générosité au développement d'expériences spirites comme pour les moulages obtenus par le Docteur Geley…
Les spirites que nous sommes se doivent de ne pas être oublieux de ceux qui illustrèrent leurs rangs ou qui, à leur tête, aux postes de commande et souvent de combat luttèrent et servirent, donnant l'exemple du courage le plus grand, du désintéressement le plus total, de l'abnégation la, plus noble.
Pour l'honneur du Spiritisme et notre fierté, nos devanciers inoubliables : Allan Kardec (1804-1869) et Léon Denis (1846-1927) furent dignes, tout au long d'une vie entièrement vouée à leur idéal et à autrui, de l'hommage que nous nous plaisons, en toute occasion, à leur rendre. A leur suite, Jean Meyer (1855-1931), leur disciple et leur continuateur dans la voie de l'action et de la recherche, fut tout aussi méritant parce qu'il fut aussi convaincu, aussi pénétré qu'eux-mêmes de la vérité, de la valeur du spiritualisme expérimental dont les principes, contenus dans l'enseignement des Esprits, découvrent, au cœur et à la raison de l'homme du XXe siècle, des horizons inattendus.
Jean Meyer qui, à l'automne d'une longue existence - au cours de laquelle rien ne lui fut épargné des communes expériences d'ici-bas - tint à prélever sur ses ressources, fruit d'un labeur acharné, les moyens nécessaires pour donner à, cette science spiritualiste les possibilités de se développer, d'apporter au monde la démonstration de l'évidence de l'âme et de sa survie au-delà des limites de la tombe. Rappelons, du reste, ses réalisations successives :
- En janvier 1917, soutenu, conseillé par Léon Denis, il fait renaître La Revue Spirite, dont la guerre avait interrompu la publication, et il en devient le directeur.
- En 1918, après avoir organisé quelques mois auparavant, avenue de Suffren, avec le concours du docteur Gustave Geley, un laboratoire pour permettre l'examen scientifique des phénomènes de la médiumnité, Jean Meyer se rend acquéreur d'un hôtel particulier, au 89, avenue Niel, à Paris. Cet immeuble devint aussitôt, et jusqu'à décembre 1954, le siège de cette belle réalisation : l'Institut Métapsychique International, auquel le Gouvernement devait accorder la reconnaissance d'utilité publique le 23 avril 1919. C'est dans cet Institut que furent étudiés, par des personnalités scientifiques particulièrement qualifiées, quelques-uns des plus grands médiums de notre époque, tels : Ossowiecki, Ludwig Kahn, Kluski, Jean Guzik et Rudi Scbneider, pour ne parler que des clairvoyants et des producteurs de phénomènes physiques. Nous dirons plus loin ce qu'il advient présentement de cette fondation; rappelons seulement que, sous la direction du docteur Gustave Geley, elle bénéficia très tôt d'une réputation mondiale des plus encourageantes et, du reste, pleinement justifiée.
- En 1919, Jean Meyer créait, en accord avec Léon Denis et Gabriel Delanne, l'Union Spirite Française qu'il installait provisoirement à son propre domicile parisien, à Auteuil. En 1923, inlassable, il achetait l'immeuble du 8, rue Copernic - toujours à Paris -, qui, devenu la « Maison des Spirites », atteignit rapidement un rayonnement considérable en France et à l'étranger. Sous son toit furent bientôt accueillis : la Fédération Spirite Internationale, l'Union Spirite Française, les services de « La Revue Spirite » et des Éditions Jean Meyer, éditions qu'il n'hésita pas de créer pour assurer par le livre la diffusion la plus large des données spirites, métapsychiques et supranormales.
Un tel effort de la part d'un homme parvenu, à force d'énergie, de persévérance, de prudence, à une situation matérielle enviable et enviée, à une époque de sa vie proche de la vieillesse qui lui donnait d'autant plus le droit d'aspirer à la tranquillité, de goûter un repos bien gagné, souligne quelles furent ses préoccupations, ses aspirations profondes.
Né en Suisse, à Rïken, 1e 8 juillet 1855, au sein d'une modeste famille d'agriculteurs, Jean Meyer eut, entre autres mérites, celui de n'oublier jamais ses origines. Si bien qu'au fur et à mesure que devait s'affirmer sa réussite dans le commerce puis dans l'exploitation viticole, dans ce pays de France qui l'accueillit jeune homme et dont il adopta, à l'âge mûr, la nationalité, il s'employa alléger le plus anonymement possible - j'en demeure le témoin - le fardeau de ceux que le destin, par les épreuves et par la maladie, accablaient souvent cruellement.
Si, dès son jeune âge, Jean Meyer pressentait intuitivement, ainsi qu'il m'en fit maintes fois confidence, les vérités immuables dont la recherche devait, un jour, l'inciter à étudier les problèmes philosophiques les plus divers, c'est dans le discours qu'il a prononcé à Londres, à l'occasion du IIIe Congrès de la Fédération Spirite. Internationale, en septembre 1928, que nous trouvons résumée toute sa pensée :
« Le Spiritualisme, dit-il, doit être scientifique, moral, social et évolutif ; il doit, de plus, s'allier â la science, favoriser les études des savants qui nous apporteront des preuves positives sur les problèmes que nous voulons résoudre.
La Métapsychique est la science de l'avenir. Beaucoup d'éminents chercheurs l'ont compris depuis longtemps. Ils nous ont laissé un travail considérable, appuyé sur des faits dûment constatés. Un de ces chercheurs des plus autorisés est le grand savant anglais, le physicien William Crookes. Nous constatons avec joie que son exemple est mieux suivi aujourd'hui qu'il ne le fut de son temps. Dans tous les pays se constituent, depuis quelques années, des sociétés métapsychiques composées de chercheurs pris dans l'élite intellectuelle et scientifique. La création incessante de ces sociétés est la meilleure preuve de l'intérêt que soulèvent â notre époque les questions touchant â l'immortalité de l'âme, â la survie de l'être pensant. Le Spiritisme et la Métapsychique doivent, dans l'intérêt supérieur de la cause, marcher la main dans la main. Si quelques divergences de vues existent encore, elles disparaîtront peu à peu par l'examen attentif des faits.
Cette collaboration étroite entre spiritualistes modernes et métapsychiques s'impose de plus en plus ; une école complétera l'autre et mènera â cette union de pensée qui viendra éclairer les problèmes à première vue insolubles. Elle ouvrira la voie lumineuse de la Vérité que tous nous recherchons avec ardeur et persévérance. Cette Union de pensée dans un même idéal nous conduira vers une compréhension toujours plus haute des oeuvres de Dieu, de ses vues sages et prévoyantes en toutes choses, vers une conception plus claire, plus vaste sur la vraie nature de l'homme et sa destinée. »
Et il précise, insistant à nouveau, que s'il a, d'une part, fondé l'Institut Métapsychique International et, d'autre part, soutenu le mouvement spirite, c'est, dit-il, que : « cette nécessité d'union et de collaboration étroite entre le spiritisme et la métapsychique apparaissait très nette en mon esprit. » C'est cette raison qui devait le guider dans la constitution, à la Maison des Spirites, de la Société d'Études Métapsychiques, société à responsabilité limitée qui, en 1933, devint - sans que ne soit en rien modifié son régime légal - la Société d'Études Spirites. Toujours existante et agissante, cette société demeure fidèle à la pensée de Jean Meyer.
Plus loin, dans ce même discours, le fondateur de l'I. M. I. et de la Maison des Spirites ajoute :
« J'ai fait don de l'hôtel, avenue Niel, directement à l'Institut Métapsychique International. La Société d'Études Métapsychiques est destinée à favoriser l'étude et la propagande du spiritualisme moderne, de la Métapsychique et des sciences s'y rattachant. Elle s'intéressera aussi aux œuvres charitables et sociales et, particulièrement, à l'éducation de l'enfance... J'espère que des concours généreux nous permettront de réaliser pleinement ce dernier projet. »
Comité général du conseil spirite international
Enfin, faisant confidence de son suprême espoir, motivé par la confiance qu'il accordait aux animateurs de l'Institut Métapsychique International et de la Société d'Études Métapsychiques, il assure :
« Après moi, lorsque mes yeux humains se seront fermés à la lumière de ce monde, la Société d'Études Métapsychiques poursuivra la réalisation de ma pensée.
Le Spiritisme est une philosophie. Il doit être et rester scientifique, moral, social, évolutif, C'est la base de sa perpétuité, de son progrès, de sa force continue. La science et la philosophie doivent marcher la main dans la main. C'est pénétré de cette pensée que j'ai fondé l'Institut Métapsychique International et la Maison des Spirites. La Société d'Études Métapsychiques, à responsabilité limitée, créée l'année dernière (1928) a pour mission principale d'assurer, après mon départ, l'avenir financier de ces deux oeuvres sous votre vigilante direction, en veillant, comme je l'ai envisagé dans mon discours de Londres, à ce que ces deux branches de mes créations cheminent vers un but unique, en se prêtant un mutuel appui et entraide.
Je sais que vous suivrez ma conception avec cet esprit large que je vous ai enseigné à apporter dans tous vos actes. J'ai tout lieu d'espérer que les dirigeants de l'Institut (Métapsychique International) adopteront mes vues. M. Charles Richet, président actuel, m'a, en effet, déclaré, dans un entretien particulier : « Si j'avais été à votre place, j'aurais parlé à Londres, comme vous !
A vous incombera de maintenir entre les deux œuvres cette harmonie, cette entraide mutuelle qui contribuera au succès de l'une et de l'autre. Vous fixerez toujours le but suprême que vous devez poursuivre : l'intérêt général du progrès spirituel, moral et social de l'humanité en l'orientant vers une conception toujours plus vaste des devoirs de chacun et de tous.
D'après la copie du testament que j'ai dicté à mon notaire et que vous trouverez sous ce pli cacheté, vous verrez que j'ai tenu à léguer à l'Institut Métapsychique International ; quelques-unes de mes parts d'apports dans la Société d'Études Métapsychiques afin de manifester ainsi encore mieux ma pensée d'union et d'action qui doivent exister entre les deux œuvres . L'une, la propagande et l'enseignement philosophique, appuyés sur les preuves expérimentales; l'autre, la recherche des preuves scientifiques de la survie et les conclusions qui en découlent.
Vous veillerez â ce que chacun suive la voie tracée et vous ne manquerez pas de les rappeler à leur devoir si cela devenait nécessaire. »
Jean Meyer devait quitter ce monde le 13 avril 1931.
La mémoire de Jean Meyer se sera encore enrichie de notre labeur, quand, aux efforts passés, nous aurons joint ceux des hommes de bonne volonté de notre époque et que nous aurons permis, par une connaissance plus large et une foi plus ferme, le resplendissement toujours plus grand de ce cher idéal qui fut pour Jean Meyer et reste pour nous la vraie raison de la vie, alors seulement nous aurons réalisé pleinement ses projets.
Il nous a quittés sa tâche faite, avec un beau courage et une sérénité admirables; au but que son noble exemple nous trace, il a consacré l'activité de sa vieillesse laborieuse, il s'est dévoué corps et âme. Ce haut exemple de désintéressement qu'il nous a donné, nous avons le devoir de lui faire porter tous ses fruits en l'imitant. Nous ne faillirons pas et resterons dignes de lui, de ses enseignements et de sa confiance, quoi qu'il arrive.
Nous l'entendons encore nous dire : « Toujours plus haut ! », et, en cette période de son centenaire, nous répondons, comme autrefois : « Présent, nous sommes prêts ! »
Hubert Forestier