Ce mois-ci, nous vous présentons la suite de l'étude sur la mort en abordant celui du deuil. Cette période de larmes, de douleur et de désespoir qui suit la perte d’un être cher est à ce jour largement reconnue sur un plan médical. On peut facilement en parle à son médecin et il existe des associations qui donnent des pistes pour se reconstruire après. L’analyse des diverses étapes après le vide laissé par le départ de nos proches permet de comprendre qu’il faut du temps après ce départ. Mais qu’en est-il sur un plan spirituel ?
Dans son ouvrage, Nos enfants sont des Esprits[1] Hermino Miranda nous rappelle : « L’affliction de ceux qui restent et le désespoir se répercutent comme des épines empoisonnées dans le cœur de celui qui est parti.
Ce témoignage est unanime dans les messages posthumes. La douleur contenue, elle, est un témoignage d’amour, mais l’affliction du désespoir qui frôle la rébellion provoque une angoisse encore plus intense pour celui qui est parti. Ce sont des larmes qui, au lieu de lui apporter un message de consolation et de nostalgie, se transforment en des chaînes d’acier qui l’attachent aux déceptions et aux frustrations de la Terre et l’empêche de poursuivre son parcours.
Parfois on tombe sur des relations affectives qui ont presque un sentiment de possession, comme si Dieu, par le biais du mécanisme infaillible de ses lois, n’avait pas le droit de déterminer la meilleure manière de nous conduire sur les chemins de l’évolution. C’est comme si les parents désespérés s’en prenaient à Dieu d’avoir osé les priver de la compagnie de leur fils ou de leur fille. Ils pensent après tous, c’était ma fille ou c’était mon fils !
D’autres savent plus ou moins qu’il est possible d’avoir des échanges, des messages, avec les Esprits et veulent tout de suite, à tout prix, avoir des nouvelles de leur être cher. Et s’ils n’y arrivent pas ou si selon eux ce qu’ils obtiennent n’est pas probant, ils réclament et se rebellent contre Dieu et contre les religions en général qui selon eux sont inutiles au moment de la douleur.
Mais les choses ne se passent pas tout à fait comme cela. Notre cher Chico Xavier a l’habitude de dire que la liaison avec le monde posthume ne fonctionne que de là-bas vers ici, et quand cela est possible et permis. On ne peut pas exiger que nos morts nous parlent au moment où nous le voulons, comme on passe un coup de fil à l’étranger. Le monde spirituel est régi par des lois qui lui sont propres, respectables et respectées. Il existe une discipline dont il faut tenir compte, un système de priorités et de possibilités qu’il faut observer.
Les témoignages peuvent venir, et ils viendront, quand ce sera possible, en suivant des règles que nous ignorons, selon un contexte dont nous ne connaissons ni les détails, ni la discipline (ou si peu).
Dans de nombreux cas, nous devons nous contenter de la conviction que l’être qui est parti continue en vie, conscient et heureux ou malheureux, selon ses propres conditions spirituelles. N’aggravons pas sa situation de mal être et ne perturbons pas sa tranquillité par un désespoir incontrôlé et rebelle. Il est infiniment plus intelligent et humain de prier pour lui ou pour elle, en paix, même s’il nous manque. »
La perte
Allan Kardec nous en parle largement dans le livre des Esprits :
Q. 934. La perte de personnes qui nous sont chères n’est-elle pas une de celles qui nous causent un chagrin d’autant plus légitime que cette perte est irréparable, et qu’elle est indépendante de notre volonté ?
« Cette cause de chagrin atteint le riche comme le pauvre : c’est une épreuve ou expiation, de la loi commune ; mais c’est une consolation de pouvoir communiquer avec vos amis par les moyens que vous avez, en attendant que vous en ayez d’autres plus directs et plus accessibles à vos sens. »
Q. 935. Que penser de l’opinion des personnes qui regardent les communications d’outre-tombe comme une profanation ?
« Il ne peut y avoir profanation quand il y a recueillement, et quand l’évocation est faite avec respect et convenance ; ce qui le prouve, c’est que les Esprits qui vous affectionnent viennent avec plaisir ; ils sont heureux de votre souvenir et de s’entretenir avec vous ; il y aurait profanation à le faire avec légèreté. » La possibilité d’entrer en communication avec les Esprits est une douce consolation, puisqu’elle nous procure le moyen de nous entretenir avec nos parents et nos amis qui ont quitté la terre avant nous. Par l’évocation nous les rapprochons de nous ; ils sont à nos côtés, nous entendent et nous répondent ; il n’y a pour ainsi dire plus de séparation entre eux et nous. Ils nous aident de leurs conseils, nous témoignent leur affection et le contentement qu’ils éprouvent de notre souvenir. C’est pour nous une satisfaction de les savoir heureux, d’apprendre par eux-mêmes, les détails de leur nouvelle existence et d’acquérir la certitude de les rejoindre à notre tour.
Q. 936. Comment les douleurs inconsolables des survivants affectent-elles les Esprits qui en sont l’objet ?
« L’Esprit est sensible au souvenir et aux regrets de ceux qu’il a aimés, mais une douleur incessante et déraisonnable l’affecte péniblement, parce qu’il voit dans cette douleur excessive, un manque de foi en l’avenir et de confiance en Dieu, et par conséquent un obstacle à l’avancement et peut-être à la réunion. »
L’Esprit étant plus heureux que sur terre, regretter pour lui la vie, c’est regretter qu’il soit heureux. Exemples :
- Deux amis sont prisonniers et enfermés dans le même cachot ; tous deux doivent avoir un jour leur liberté, mais l’un d’eux l’obtient avant l’autre. Serait-il charitable à celui qui reste d’être fâché que son ami soit délivré avant lui ? N’y aurait-il pas plus d’égoïsme que d’affection de sa part à vouloir qu’il partage sa captivité et ses souffrances aussi longtemps que lui ?
Il en est de même pour deux êtres qui s’aiment sur la terre ; celui qui part le premier est le premier délivré, et nous devons l’en féliciter, en attendant avec patience le moment où nous le serons à notre tour.
- Vous avez un ami qui, auprès de vous est dans une situation très pénible ; sa santé ou son intérêt exige qu’il aille dans un autre pays où il sera mieux sous tous les rapports. Il ne sera plus auprès de vous momentanément, mais vous serez toujours en correspondance avec lui : la séparation ne sera que matérielle. Serez-vous fâchez de son éloignement, puisque c’est pour son bien ?
La doctrine spirite, par les preuves patentes qu’elle donne de la vie future, de la présence autour de nous de ceux que nous avons aimés, de la continuité de leur affection et de leur sollicitude, par les relations qu’elle nous met à même d’entretenir avec eux, nous offre une suprême consolation dans une des causes les plus légitimes de douleur. Avec le spiritisme, plus de solitude, plus d’abandon ; l’homme le plus isolé a toujours des amis près de lui, avec lequel il peut s’entretenir.
Nous supportant impatiemment les tribulations de la vie ; elles nous paraissent si intolérables que nous ne comprenons pas que nous les puissions endurer ; et pourtant, si nous les avons supportées avec courage, si nous avons su imposer silence à nos murmures, nous nous en féliciterons quand nous serons hors de cette prison terrestre, comme le patient qui souffre se félicite, quand il est guéri, de s’être résigné à un traitement douloureux.
La prière
Elle est un sédatif pour l’âme, aussi bien pour celui ou celle qui en reçoit ces vibrations. Les Esprits qui sont partis espèrent de nous que nous continuerons notre vie, en nous épanouissant dans la pratique du bien et de l’amour du prochain, pour qu’un jour nous puissions être ensemble de nouveau, mais pas avec l’exclusivité possessive des égoïstes. Personne n’appartient à personne, parce que nous sommes tous à Dieu. Le fils d’aujourd’hui était peut-être le père ou le frère d’une vie passée ou bien il le sera dans une existence qui se situe dans les brumes du futur.
« Il n’y a pas de séparation pour ceux qui s’aiment[2]. Si seulement, l’homme pouvait changer le regard qu’il porte sur la mort et ne plus voir en celle-ci, chagrin, séparation et douleur. S’il acceptait, que la mort soit toute autre que celle qu’on lui a inculquée et dans laquelle il s’est emprisonné. Il doit dépasser ce qui le limite. Les yeux troublés par les larmes, il verrait, celui qu’il aime, se désincarner et être accueilli dans la symphonie de la vie, dans la joie et le bonheur. Accompagné des chants célestes, il chanterait pour celui qui s’en va vers d’autres univers. C’est une mélodie qui emporte l’âme, bien loin des tourments de la terre et non la tristesse de ce que l’homme se représente de la mort. Si en toi, tu trouves le silence et le calme, le chant apaisant des étoiles viendra jusqu’à toi.
Dans son trépas et au-delà de tes bras, celui que tu pleures est bien vivant. Il fait partie de l’univers, il est enfant de l’univers. Tu n’es pas seul ou abandonné comme tu le crois. Il te chante l’amour, la vie et la joie ; seulement tes cris étouffent sa voix, tu t’interdis de l’entendre. Il n’est plus celui que tu veux qu’il soit, et pourtant, il est là, pour toi, tout amour. Ne le refuse pas. Crois-tu que son désir était de te faire souffrir ? Crois-tu qu’il veuille pour les années avenir, t’enfermer à sa place, dans son tombeau ?
Dans cette tombe, toi seul y repose, toi, être vivant ! Dans ce cercueil sont enfermés tes désirs, tes devenirs et tes souhaits. Celui que tu aimes, n’y est pas, il s’en est déjà allé. Chaque fois que tu y vas pour pleurer, tu pleures sur ce que de toi y fut enterré. Si dans la douleur, tu restes, alors sur la stèle grave ces mots : Ci-gît mes espoirs, mes demains, mes projets et mes souvenirs. »
Les témoignages[3]
Un enfant : « Mère, lorsque devant la tombe, tu laisses couler les larmes de la souffrance, crois-tu vraiment que ton enfant est là ? Retournes en toi, tu le retrouveras. Tu ne l’abandonnes pas si devant la stèle tu ne pleures pas. Il n’est pas là. Ton enfant est dans la vie, dans la renaissance, immortel. Pour l’instant, ta tristesse et ta douleur l’enferment dans son cercueil. Mère, enferme dans ce noir tombeau à quelques pieds sous terre, ce que tes yeux reflètent : Le néant, car lui seul peut se situe dans le linceul où rien ne commence et où tout fini. Celui que tu pleures n’y a pas sa place. Retournes en toi. Fais le vivre, non plus avec ton désespoir, car celui-ci est trompé par l’absence. Ressuscite-le avec ton cœur, lui seul est guidé par l’amour qui lui ouvrira les portes de la vie. »
Isabelle : « C’est une entité évoluée spirituellement, elle se trouve assez bien dans l’au-delà. Pourtant, elle a beaucoup de tristesse en elle. Elle me dit qu’on ne la laisse pas quitter le plan terrestre et demande à ses parents d’avancer comme elle.
J’avance vers la vie, la vie c’est la joie, la lumière et non pas la tristesse et l’obscurité. Tu m’as mis au monde. Fais-moi renaître. As-tu voulu un jour me rendre triste ? Je ne crois pas. Pas avec l’amour que j’ai reçu et que je continue à recevoir. Mais aimer c’est aussi libérer. Libérez-vous. Soyez gais, heureux, soyez vivants comme moi je le suis aujourd’hui. Non, je n’ai pas tout laissé, non, je n’ai pas tout quitté, je suis plus présente qu’avant. J’ai changé un peu, beaucoup, pas du tout. Peu importe car je suis. La vie est tellement belle mais la mort est tellement douce tellement sereine. Le paradis, oui je le trouverai lorsque vos cœurs auront trouvé la paix. Je vous aime. »
Jacques, l’époux de Josette : « Le samedi 16 avril 2011, il y eu une réunion exceptionnelle au centre. Il y avait du monde et par hasard la seule chaise qui était disponible se trouvait à mes côté. Dès que Josette y a pris place, j’ai ressenti la volonté de son mari à vouloir se communiquer. Je refusais car ce n’était pas le moment. M’expliquant que c’était son anniversaire, il me supplia d’accepter une incorporation. Il était mal et insistait tellement que je finis par accepter. Ce qui me rassurait c’est que mon guide ne s’y opposait pas et je ne pouvais pas laisser l’Esprit de Jacques dans une telle peine, j’avais l’impression que c’était vital pour lui et vital pour son épouse qui ne se doutait pas de ce qu’il se passait. Je lui ai laissé pendant un moment mon corps, il a simplement pris son épouse dans ses bras en lui disant qu’il l’aimait. Il l’a remercié pour tout l’amour qu’il avait reçu et il nous a quittés. »
Le mari de Marie-Pierre : « Marie-Pierre est décédée d’une longue maladie. Lorsque son marie reçu son message, il était très ému et son regard se brouillait de larmes. Toutes les informations que Marie-Pierre avait transmises étaient justes. Sans aucun doute, le mari reconnu sa femme, son caractère, sa maladie, sa fille qu’elle avait dessinée. Il nous quitta avec le sourire et le cœur rempli de joie. Il avait retrouvé un peu d’espoir : « Là-haut, je suis pleine de joie, je ne tiens pas en place, je suis curieuse de tout, comme avant. J’ai retrouvé ma grand-mère et mon père. Tu sais, je t’avais dit que je ne vivrais pas vieille. Je suis heureuse ici, soulagée de ma maladie, évidemment j’aimerais que tu sois avec moi, mais je dois patienter et toi aussi. Tu as encore plein de choses à vivre. Pour moi, c’est la liberté et pour toi aussi, tu ne dois pas t’enfermer sur toi-même et tu feras une nouvelle rencontre. Je suis libre et tu dois l’être aussi. Je sais que tu m’aimes, je le sais … Je pense à mes enfants et je sais que Marion porte une blouse blanche maintenant. Je vous remercie, je ne me suis jamais sentie seule et vous m’avez tenu la main jusqu’au bout. Je n’ai pas eu peur de mourir car je suis croyante. J’avais encore tant de choses à partager avec toi et à te dire, ne doute pas. J’aimerais revenir pour vous faire partager ce que je vis ici. Je suis soulagée maintenant. »
Communication obtenue en mai 1888[4] qui répondait à la grande douleur qu’avait causé la mort des deux personnes : « Voudriez-vous entendre le concert joyeux qui se produit là-haut, lorsqu’une âme chère et attendue fait sa rentrée dans le monde des Esprits ? Désireriez-vous contempler le spectacle du bonheur du revoir ?
Oh ! Nous qui avons éprouvés ces joies, nous voudrions pouvoir vous les faire partager. Mais hélas ! Pourquoi faut-il que trop souvent notre bonheur soit troublé par vos tristesses ? Lorsque l’un de vous est mûr pour le pays des âmes, il lui faut s’élever au-dessus des souffrances terrestres et briser tous les liens qui l’attachent à la terre. Rien ne saurait le retenir ni l’enchaîner plus longtemps ; semblable au prisonnier, à qui la liberté est rendue, il s’envole vers les horizons nouveaux qui lui sont ouverts. Oh ! Ne pleurez pas trop sur vos chers envolés, car, après avoir connu les amertumes de la séparation, vous connaîtrez aussi les douceurs du revoir. »
Les faits purement physiques sont impuissants à faire des convictions durables. Le professeur Charles Richet le reconnaît lui-même : « Nos convictions, dit-il dans son discours prononcé en 1899, à la société anglaise des recherches psychiques, celles des hommes qui ont vu, devrait servir à convaincre les autres ; mais au contraire, c’est la conviction négative de ceux qui n’ont rien vu et ne devraient rien dire, qui affaiblit et arrive à détruire la nôtre. Il n’est pas une seule chose, suivant l’usage que nous en ferons, qui ne soit bonne ou mauvaise. Il est injuste, en tout cas, de faire ressortir le mauvais côté des pratiques spirites, sans signaler les bienfaits qui en découlent et qui l’emportent de beaucoup sur les abus et les déceptions. »
[1]Hermino C. Miranda, Nos Enfants sont des Esprits, p. 183 à 190.
[2]L’au-delà, messages d’amour, messages d’espoir de Mauricette Ruchot.
[3] L’au-delà, messages d’amour, messages d’espoir de Mauricette Ruchot.
[4] Dans l’invisible de Léon Denis.