Ce mois-ci, nous vous présentons le spiritisme et la science, et notamment le rapport de la Société Dialectique de Londres. La Société Dialectique de Londres peut être comparée à notre académie des Sciences ; elle compte parmi ses membres les hommes les plus éminents de l’Angleterre.
Fondé en 1867 sous la présidence de Sir John Lubbock, et comptant au nombre de ses vices-présidents Thomas-Henry Huxley, un des professeurs les plus savants de l’Angleterre, et M. Georges-Henry Lewes, physiologiste éminent, décida, dans sa séance du 6 janvier 1869, qu’un comité serait nommé pour étudier les prétendus phénomènes du spiritisme et en rendre compte à la Société. Le débat qui s’éleva au sujet de cette décision montra que la plupart des membres ne croyaient pas au spiritualisme, et les journaux anglais accueillirent avec des cris de joie cette nomination d’un comité, qui, on le pensait, coulerait à fond le spiritisme.
A la profonde surprise du public anglais, la commission, après dix-huit mois d’études, conclut en faveur de la réalité des manifestations.
Parmi les membres qui prirent part à cette enquête, était le grand naturaliste anglais Alfred Russell Wallace, émule et collaborateur de Darwin, et déjà, lui, convaincu de la réalité des phénomènes. Comme Mapes, comme Hare et tant d’autres, M. Wallace, vaincu par l’évidence, a fait courageusement sa profession de foi dans un livre : Miracles and modern Spiritualism.
Au nombre des témoins entendus par le comité de la Société Dialectique, figuraient M. le professeur Auguste de Morgan, président de la Société mathématique de Londres, secrétaire de la Société Royale astronomique, et M. Varley, ingénieur en chef des compagnies de télégraphie internationale transatlantique, inventeur du condensateur électrique, qui a résolu le problème de la télégraphie sous-marine.
Rapport de la Société Dialectique de Londres
Depuis sa création, c’est-à-dire depuis le 16 février 1869, votre sous-comité a tenu quarante séances, dans le but de faire des expériences et des épreuves rigoureuses.
Toutes ces réunions ont eu lieu dans les demeures privées des membres du comité, afin d’exclure toute possibilité mécanique disposé d’avance ou d’artifice quelconque.
L’ameublement des pièces dans lesquelles ont a fait les expériences a été, dans chaque circonstance, leur ameublement ordinaire.
Les tables dont on s’est servi ont toujours été des tables à manger, pesantes, qui demandaient un effort considérable pour être mises en mouvement. La plus petite avait 5 pieds 9 pouces de long sur 4 pieds de large, et la plus grande 9 pieds 3 pouces de long sur 4 pieds 1/2 de large : la pesanteur était en proportion.
Les chambres, les tables et tous les meubles en général ont été soigneusement examinés à plusieurs reprises avant, pendant et après les expériences, pour obtenir la certitude qu’il n’existait aucun truc, instrument ou appareil quelconque, à l’aide desquels les sons ou les mouvements ci-après mentionnés eussent pu être produits.
Les expériences ont été faites à la lumière du gaz, excepté dans un petit nombre d’occasions spécialement notées dans les minutes.
Votre comité a évité de se servir de médiums de profession ou médiums payés, le médium étant l’un des membres de votre sous-comité, personne placée dans une bonne position sociale, et d’une intégrité parfaite, qui n’a aucun objectif pécuniaire en vue et ne pourrait tirer aucun profit d’une supercherie.
Votre comité a tenu quelques réunions sans la présence d’aucuns médium (il est bien entendu que, dans ce rapport, le mot « médium » est simplement employé pour désigner un individu sans la présence duquel les phénomènes décrits, ou n’ont pas lieu, ou se produisent avec moins d’intensité et de fréquence), pour essayer d’obtenir par quelque moyen, des effets semblables à ceux qu’on observe quand un médium est présent.
Aucun effort ne fut capable d’obtenir quelque chose d’entièrement semblable aux manifestations qui ont lieu en présence du médium.
Chacune des épreuves que l’intelligence combinée des membres de votre comité pouvait imaginer, a été faite avec patience et persévérance. Les expériences ont été dirigées avec une grande variété de conditions, et toute l’ingéniosité possible a été mise en oeuvre pour inventer des moyens qui permissent à votre comitéde vérifier ses observations et d’écarter toute possibilité d’imposture ou d’illusion.
Votre comité a restreint son rapport aux faits dont ses membres ont été collectivement témoins, faits qui ont été palpable aux sens, et dont la réalité est susceptible d’une preuve démonstrative.
Environ les quatres cinquièmes des membres de votre sous-comité ont débuté dans la voie des investigations par le scepticisme le plus complet, touchant la réalité des phénomènes annoncés, avec la ferme croyance qu’ils étaient le résultat : soit le l’imposture, soit de l’illusion, soit d’une action involontaire des muscles. Ce fut seulement après une irrésistible évidence, dans des conditions qui excluaient l’une et l’autre hypothèse, et après des expériences et des épreuves répétées, que les membres les plus sceptiques de votre sous-comité furent, à la longue et malgré eux, convaincus que les phénomènes qui s’étaient produits pendant cette enquête prolongée étaient de véritables faits.
Le résultat de leurs expériences, longtemps poursuivies et dirigées avec soin, a été, après des épreuves contrôlées sous toutes formes, d’établir les conclusions suivantes :
Premièrement
Dans certaines dispositions de corps ou d’esprit, où se trouvent une ou plusieurs personnes présentes, il se produit une force suffisante pour mettre en mouvement des objets pesants, sans l’emploi d’aucun effort musculaire, sans contact ni connexion matérielle d’aucune nature entre ces objets et le corps de quelque personne présente.
Deuxièment
Cette force peut faire rendre des sons, que chacun peut entendre distinctement, à des objets solides qui n’ont aucun contact ni aucune connexion visible ou matérielle avec le corps de quelque personne présente ; et il est prouvé que ces sons proviennent de ces objets par des vibrations qui sont parfaitement distinctes au toucher.
Troisièment
Cette force est fréquemment dirigée avec intelligence.