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Dolores Bacelar
Dolores Bacelar

Nous vous proposons trois nouveaux contes traduits de l'ouvrage A l'ombre de l'orme que nous vous avions présenté lors du mois de novembre 2002

La mort de la bien-aimée

Mort de la bien aimée

Nous marchions sur la route parallèle à la grande rivière, suivant à petits pas notre "rishi" tout en l'écoutant. Mais moi, plongé dans le silence, j'avançais les yeux rivés au sol, triste et malheureux. La nuit précédente, la mort m'avait fauché la plus gentille, la plus belle, la plus pure des fiancées. Et rien n'est plus douloureux que de sentir s'évanouir dans ses bras la vie en fleur d'un être aimé.
Le deuil obscurcissait mon regard, m'occultant les beautés du paysage. Même le chant des oiseaux résonnait dans mes oreilles comme un glas. Le "rishi" marchait, semblant ne pas partager ma souffrance. Imperturbable, il parlait de la sagesse divine.
Pleurant la perte de ma bien-aimée, je percevais mal son enseignement. Que m'importaient le monde, la vie, le savoir, puisque la mort m'avait enlevé ma douce promise ? Ma douleur était si grande à son souvenir que j'avais envie de m'arracher le cœur et de mourir aussi.
Oh, ma tendre fiancée, aussi unique sur cette terre que le lotus bleu, je ne sentirai plus jamais le parfum suave de ta peau couleur d'anémone rosée. Sur qui se portera à présent ta tendresse ? Désormais, je ne tiendrai plus tes belles mains effilées et blanches entre mes mains calleuses. Et tes yeux, hier si doux et reposants, seront livrés en pâture aux vers. Ces yeux étaient mon lac de paix et ma lumière. Je les considérais comme des îles dans l'océan de mon existence.
" Jardinier, m'appela le "rishi". Tiré de mes tristes pensées, je regardai le maître. Ses doux yeux se posèrent sur les miens, pleins de compréhension. Devant nous, quelques rosiers étaient plantés au bord de la route. Une ultime rose, aussi rouge que les lèvres de ma bien-aimée, perdait ses pétales.
- Jardinier, me redit le "rishi", où repose la vie de cette rose ? En ses pétales ou dans sa semence ?
- Dans sa semence, répondis-je.
- Oui, Jardinier. La vie de cette rose n'est plus dans ses pétales qui jonchent maintenant le sol, mais elle demeure dans la petite semence. Demain, cette vie ressurgira sous forme de nouveaux rosiers, s'éternisant ainsi en de multiples autres roses. La graine originelle a germé de la Rose Divine dans le cœur de Dieu, puis elle a transmis l'héritage de l'immortalité à toutes les autres graines. Jardinier, avec leur beauté, les roses ne sont que les inflorescences fugaces de la vie. Mais la Vie elle-même, celle qui est éternelle, c'est à dire qui ne connaît pas la mort, cette Vie réside uniquement dans leur semence."
Nous poursuivîmes notre route. Le soleil, très haut au-dessus de nous, portait en lui la nostalgie de l'ombre douce de l'orme. Je méditais les mots du "rishi" tandis que je marchais à ses côtés. Je ne souffrais plus mentalement à l'évocation du corps de ma bien-aimée sur la terre. Ses mains, ses yeux, ses cheveux aussi longs que la tige d'une agapante, tout cela ne représentait plus que des instants de beauté dans sa vie.
Mais cette conscience, si elle atténuait ma douleur, ne me restituait pas pour autant ma douce promise. Jamais plus je ne reverrai son petit corps, que le "Sari" épousait avec délicatesse. Jamais plus je n'entendrai son pas accompagnant le mien, comme lorsque nous marchions à l'unisson sur le même chemin. Oh, ma bien-aimée, ma tant-aimée, pourquoi la mort t'a-t-elle enlevée à moi ?
" Jardinier, la voix du "rishi" me rappela à la réalité. Te souviens-tu de cet homme jugé assassin ?
- Oui, "rishi", il a tué le père de cinq fils.
- Non, Jardinier, tu te trompes. Tu penses comme l'assassin lui-même, en disant qu'il a tué. En vérité, personne n'a tué, personne n'est mort. De ce qui vit dans l'homme, seul l'esprit est d'essence immortelle. Le corps, lui, est mortel, transitoire."
Un oiseau, venu de très loin, se posa sur la branche d'un figuier planté au bord du chemin. Reprenant son vol, il se dirigea vers l'infini qui était d'un bleu lumineux car le soleil dardait alors de tous ses rayons. En regardant l'oiseau dont le vol s'estompait dans le lointain, le "rishi" poursuivit : " Le bonheur appartient à qui vit seulement les choses éternelles. Voilà pourquoi il est inaccessible à ceux qui le cherchent dans les choses éphémères. L'éternel ne peut être atteint que par l'éternel.
Jardinier, n'aimes-tu que l'éphémère ? Ne possèdes-tu que des roses périssables ? Si oui, alors tu ne connaîtras jamais la plénitude du Bonheur."
La route s'allongeait pour mieux épouser la rivière. Je méditais, tandis que le maître marchait près de moi et me consolait en précisant :
" Jardinier, le corps de ta fiancée bien-aimée était un jardin. En lui fleurissait le lotus immortel, l'essence sacrée qui possède la Vie véritable. Ce lotus divin ne perd pas sa substance avec le temps qui passe, il ne connaît pas la mort. Il est la Vie elle-même. Anxiétés et peurs, frustrations et désenchantements, maux, souffrances, faim et soif appartiennent seulement à la terre. En revanche, amour, vertu, savoir, bonheur sont dons de l'esprit; voilà pourquoi ils sont éternel. "
Un long silence accompagna les mots du "rishi". Au bout d'un moment, il me regarda dans les yeux et conclut avec une foi qui donna du crédit à ses propos :
" Jardinier, ta bien-aimée n'est pas morte. Elle marchera à ton côté dans l'espace et dans le temps, incorporelle parmi les corps de chair, mais immuable en beauté et en forme. Elle t'attendra, ta promise, pour une rencontre majeure dans l'Infini. "
Après avoir écouté le "rishi", je me suis redressé de la tombe du désespoir dans laquelle je m'étais précipité. Mes yeux se sont rouverts à la lumière et mes sens sont revenus à la réalité.
Alors je réalisai combien peu j'aimais ma douce fiancée. Comment avais-je pu croire que ses yeux tranquilles, aussi sereins que la lumière de la lune, perdraient leur lumière ?
Quelle mort pourrait être assez forte pour détruire la tendresse du sentiment dans son cœur ? Comment sa bonté pour les simples et les pauvres pourrait-elle s'effacer ? Le feu intérieur qui toujours l'avait portée vers le beau, le pur, le bon, s'éteindrait-il comme un vulgaire feu sous l'action de l'eau ?
Oh ! ma promise bien-aimée, tu vis éternellement, et non pas seulement dans l'éphémère de l'instant. Attends-moi dans l'infini, ma bien aimée. J'irai à ta rencontre et nous nous reverrons, bientôt peut-être. Cet après-midi, au crépuscule prochain, ce soir, demain ? ... Qui sait ? Mais qu'importe le temps pour celui qui est promis à l'Éternité !

Le vendeur de cruches

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Nous marchions de bonne heure sur la route quand le "rishi" se baissa pour ramasser une pièce couverte de sable que quelqu'un avait dû laisser tomber. Sans s'arrêter, il examina la pièce dans le creux de sa main et nous dit, peu de temps après :
" Les richesses de la terre n'appartiennent qu'à la terre. Elles existent pour servir l'humanité comme outils de progrès, c'est pour cela qu'elles résident ici et passent de mains en mains. L'homme qui les exploite à son propre bénéfice, alors qu'il a la responsabilité de les administrer pour le bien commun, s'éloigne chaque fois un peu plus de la vraie richesse. Mais les richesses de la vertu, de l'amour, de l'harmonie - il est vrai - sont intransmissibles, ne se vendent pas, ne se perdent pas, ne se transmettent pas en héritage. "
Alors, le "rishi" nous raconta une histoire :
" Dans un village, un potier, homme bon et charitable, vivait paisiblement de la fabrication et de la vente de ses cruches. Cette activité lui rapportait suffisamment pour vivre et restaient même quelques pièces pour acheter du riz qu'il distribuait aux pauvres venus frapper à sa porte.
Ce potier passait tous ses après-midi à prier au temple et il se sentait en paix avec le Seigneur qui lui murmurait dans son cœur :
- Tu es un homme bon, tu seras riche quand tu entreras dans mon royaume.
Mais un après-midi, le potier vit passer devant chez lui la caravane d'un noble qui, entouré de pompes et d'honneurs, jetait des pièces aux pauvres du chemin, avec nonchalance. Voyant cet homme, le potier se dit en lui-même :
- Voici un homme qui peut tout, grâce au prestige de sa richesse. Comme il doit être agréable de vivre ainsi, de posséder des palais somptueux, d'avoir de nombreux serviteurs, de jouir des belles choses de la vie, d'être puissant, craint et respecté. Si j'étais l'un d'entre eux, je pourrais encore mieux servir le Seigneur. Au lieu de simplement leur jeter des pièces, j'apporterais de l'aide aux pauvres afin qu'ils aient une vie décente et digne. Par mon exemple, d'autres grands seigneurs seraient amenés à agir de même et ainsi je contribuerais à éradiquer la faim et la misère dans le monde. Par mon action, je gagnerais le respect et la considération de tous, je serais perçu comme un homme généreux et magnanime, accomplissant fidèlement ses devoirs en conformité avec les lois divines.
Tandis qu'il regardait s'éloigner la caravane, l'idée germa dans son esprit qu'il pourrait lui-aussi devenir riche. Pour cela, il suffisait qu'il se consacre sans cesse à la fabrication de cruches finement modelées qu'il pourrait vendre à prix élevé lors de la grande foire d'été dans la capitale du royaume.
- Et oui ! ... pensa-t-il, pourquoi se maintenir dans cette vie humble, s'il pouvait à coup sûr par son travail devenir un grand seigneur. Sa décision prise, il se mit tout de suite à l'ouvrage. Le jour même, il commença à préparer l'argile, à modeler des cruches et encore des cruches; cruches dans lesquelles il mit tout son art et toute son habileté. Et il ne faiblit pas. Dans sa hâte d'accéder à la richesse, il travailla des heures et des heures, jour et nuit, sans cesse. Chaque minute lui paraissait précieuse, alors il ne se reposait jamais, ne perdait pas de temps. Il n'allait plus au temple l'après-midi pour prier et lorsque quelqu'un frappait à sa porte pour demander la charité, au lieu de lui donner un bol de riz, il lui montrait du doigt ses cruches en disant :
- Attendez un peu que je sois riche. Je serai riche quand j'aurai vendu mes cruches lors de la foire d'été. A ce moment-là, j'en ferai profiter tout le monde. Revenez donc tous après la foire !
Et immédiatement, il reprenait son travail. Ses mains agiles modelaient les cruches, leur donnant des formes gracieuses et des couleurs délicates tandis qu'il rêvait à sa richesse et à la vie qui en découlerait. Confiant dans l'aide du Seigneur, il n'envisageait pas quelque insuccès dans ses plans. En effet, si le Seigneur lui avait promis la richesse dans les cieux, pourquoi ne l'aiderait-il pas à l'atteindre déjà sur la terre ? Devenu riche, il pourrait aussi être prodigue et partager avec les démunis. Bien sûr, il souhaitait donner une poignée de riz dès à présent à tous ceux qui frappaient à sa porte, mais cela n'était pas possible. Il devait économiser pour couvrir les frais de préparation de la foire et subvenir à ses propres besoins. Pour toutes ces raisons, les pauvres devaient patienter encore un peu et attendre le jour de la grande vente.
Le temps passa, les jours devinrent des semaines qui à leur tour devinrent des mois et finalement l'été arriva. Le potier, satisfait, constata que son travail n'avait pas été inutile : son dépôt était rempli de cruches qu'il vendrait à prix d'or. Il les chargea sur le dos des mules et entreprit son voyage vers la capitale.
Il marchait plein d'exaltation car le moment de percevoir la récompense de tant d'efforts approchait. Il estimait les prix, calculait les profits, se voyait déjà riche et puissant comme dans ses rêves.
Mais, dans une courbe du chemin, voilà que des hommes armés surgirent devant la caravane. C'étaient des brigands qui dévalisaient les voyageurs en route pour la foire dans la capitale.
Le potier, sans possibilité de se défendre, dut assister, désespéré, au détournement de ses mules et de ses cruches par les voleurs qui, rapidement, disparurent dans la montagne. Seul, à pieds, le potier resta là sans savoir quoi faire. Il s'assit au bord de la route, sanglotant, la tête reposant sur ses genoux.
- Oh, se lamenta-t-il, tout mon travail perdu, toutes mes cruches volées ! Maudits brigands, ils m'ont aussi pris ma richesse; sans elle, je ne pourrai plus servir le Seigneur !
- Tu te trompes, murmura la voix du Seigneur aux oreilles du potier. Tous les biens que tu as perdus ne servaient que ton ambition et ta vanité. Les seuls biens que je prise sont éternels, personne ne peut les voler. Tu pleures ta richesse envolée, mais ta richesse, il y a longtemps que tu l'as perdue.
- Quand, Seigneur ? demanda le potier surpris. - La première fois que tu as refusé l'aumône à un homme affamé qui frappait à ta porte.
Et le "rishi" conclut cette histoire par ces mots :
- C'est ainsi que souvent, dans notre soif de richesse, nous devenons infortunés aux yeux du Seigneur. "
Nous suivions toujours le "rishi" qui marchait sur la route et nous le regardions. Un peu plus loin, un garçon vint dans notre direction. Le "rishi" lui tendit la pièce que le hasard avait remise entre ses mains.
Le visage du petit garçon s'éclaira d'un sourire, enrichissant encore davantage le lot de bénédictions que cette journée nous avait déjà apportées.

Le rossignol et la larme

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Le teint madrépore illuminait l'après-midi, annonçant la venue du soir quand nous entendîmes chanter le rossignol dans les ruines d'une petite chapelle. Comme un récital de harpes angéliques, le chant de cet oiseau nous déposa dans le cœur un message de paix et d'harmonie.
Nous écoutions, aux anges.
Quand le rossignol se tut, toute la nature demeura silencieuse.
Alors, le "rishi" commença de nous raconter une ancienne légende : " Il y a très longtemps, un petit oiseau qui ne savait pas chanter, vivait triste dans le bois, tandis que les autres oiseaux exaltaient les joies des aubes et la tristesse des crépuscules par d'harmonieux gazouillis.
Un jour, en le voyant si malheureux, la fée du bois lui murmura, énigmatique :
- Si tu bois la larme miraculeuse, la plus triste de toutes les larmes du monde, tu pourras chanter et ton chant symbolisera, pour toujours, l'harmonie de la nature.
- Si cela arrive, exulta l'oiseau, comme je serai heureux.
- Non, petit oiseau, car ton chant ne sera jamais entièrement compris de ce monde.
Et ce disant, la fée de la forêt disparut entre les pétales d'une orchidée blanche.
Le petit oiseau s'envola, pensif.
Où trouver la larme la plus triste qui lui permettrait de chanter ?
Alors, il se souvint d'une femme inconsolable, une campagnarde, qui pleurait la mort de son fils unique.
Quittant le bois, il vola vers la maison de cette femme et se posa sur le toit. Il entendit le son d'une berceuse qui venait de la maison. C'était la voix de la campagnarde qui berçait un nouveau-né.
Il n'y a plus de tristesse dans cette voix, pensa l'oiseau.
Peut-être trouverais-je la larme la plus triste du monde dans les yeux d'un enfant orphelin, pensa l'oiseau. Quelquefois, il rencontrait un enfant qui avait perdu ses parents et vivait si malheureux que ses yeux, rougis par les pleurs, ressemblaient à de petites balles dégonflées ayant perdu leur brillance et leur couleur.
Il chercha l'enfant et le trouva entouré de jouets, souriant et heureux, car il avait été accueilli dans un nouveau foyer.
Accablé, le petit oiseau reprit son envol. Jamais, sûrement, il ne trouverait la larme miraculeuse dont lui avait parlé la fée de la forêt.
Pendant qu'il volait, il pensa que cette larme prend peut-être naissance dans le regard des âmes sans amour et, à cette idée, l'espoir revint dans son petit cœur. Il avait entendu parler d'une jeune fille qui se mourait de douleur et de nostalgie car son fiancé l'avait quittée l'hiver précédent, et elle passait ses journées sous un pommier à revivre les moments de bonheur qu'ils avaient vécus ensemble.
Le petit oiseau la trouva sous ce même arbre, mais échangeant un serment d'amour avec un nouvel amoureux.
- C'est le printemps, dirent les fleurs du pommier, se souvenant que les amours humaines passent comme passent les saisons.
L'oiseau s'envola, désireux de fuir et d'oublier sa petite vie inutile et sans poésie qui ne connaissait ni la joie du matin, ni le soleil de l'après-midi. Il finirait bien par oublier son rêve d'un jour : chanter comme les autres oiseaux.
Il vola, désespéré, pendant très longtemps. Il traversa prairies et déserts, il survola de hautes montagnes et se posa, fatigué, sur la branche d'un olivier.
- Laissez venir à moi tous ceux qui souffrent, laissez venir à moi les petits enfants ...
C'était la voix du divin "Swami" qui parcourait la terre, prêchant l'amour et l'espoir à une multitude de miséreux.
- Je suis petit et souffrant, pensa l'oiseau.
Et depuis ce jour, comme tous les tristes et les souffrants, subjugué par cette voix, il suivit le "Swami" partout.
Lorsque le Divin Maître marchait dans les bois parfumés de Jéricho ou dans les plaines de Samarie, le petit oiseau voletait à ses côtés. C'est ainsi qu'il se percha sur le mât d'un bateau en mer de Galilée et sur les cèdres du mont Carmel. A la suite du "Swami", il respirait la poussière de nombreuses routes et rencontrait bien des peuples et bien des villes étrangères. Parcourant monts et vallées, infatigable, sans jamais le quitter, il ne plaignait jamais les distances.
Lorsqu'il l'écoutait, il oubliait sa tristesse; il comprenait qu'en dehors de sa propre existence, il y avait des souffrances et des misères autrement plus grandes que les siennes.
S'il ne savait pas chanter, cela n'avait finalement aucune importance. Rien d'autre ne l'intéressait plus, à présent, que de connaître l'Amour et la Bonté dont le "Swami" avait parlé de Nazareth à Jérusalem, du Mont Hermon au Mont Thabor.
Partout où le Maître allait, l'oiseau le suivait, perché quelque part, l'écoutant en silence. Ses petits yeux fixaient le visage du Maître et il semblait le comprendre mieux que tous ceux qui l'accompagnaient. Cet après-midi-là, c'était l'après-midi du sermon sur la montagne. Alors que le "Swami" entonnait le cantique de la Miséricorde Divine, le petit oiseau écoutait en extase.
Le feuillage du sycomore frissonnait aussi en entendant cette ballade des Bienheureux et un rayon de soleil s'attardait au couchant dans l'espoir de l'écouter jusqu'à la fin.
A la dernière note du divin chant, le petit oiseau pleura du doux pleur qu'on les âmes qui ont trouvé Dieu.
Néanmoins, la multitude de ceux qui avaient suivi le "Swami" jusqu'ici se dispersait déjà. La plupart d'entre eux étaient venus chercher de la nourriture terrestre, car ils avaient entendu parler de la multiplication des pains et des poissons. Plusieurs même étaient partis en proférant gros mots et injures. A ce moment-là, les disciples du "Swami" l'avaient quitté aussi et il était seul sur le mont.
Et son regard d'une tristesse infinie et d'une infinie compassion accompagna cette foule qui descendait la montagne, pressée de satisfaire ses appétits matériels.
Au loin, sinueux et encaissé, découpé dans les rochers nus, on distinguait le chemin de croix qui mène au Golgotha.
Au-delà, sur le Mont des Oliviers, près du village de Béthanie, se dessinait la silhouette du temple, rutilant d'or et de marbre, scintillant comme la neige du Mont Hermon sous le soleil.
Au-dessous, amoncelées et sales, les maisons de Jérusalem ressemblaient à des nids de guêpes.
Et le "Swami" frémit devant ce décor.
Il venait d'avoir la prémonition de Gethsémani, du Sanhédrin, de la multitude lui jetant des pierres, de la croix et du calvaire. Il aurait à souffrir en outre du reniement de Pierre, son meilleur disciple, lequel l'attristerait bien plus que la trahison de Judas.
En regardant l'infini, le doux "Swami" s'exclama avec angoisse :
- Ô Père, que je boive jusqu'au bout le calice des amertumes, mais que l'humanité apprenne à aimer l'amour pour l'Amour.
Une tristesse infinie envahit le regard du Maître. Il entendait encore les injures et les moqueries de la foule insatisfaite. Quand les hommes comprendraient-ils donc le cantique des Bienheureux ? Et son cœur battait, plein de compassion pour la faiblesse et la misère humaine.
Un gémissement sortit de sa poitrine, triste et douloureux. Jésus venait de ressentir toute l'ingratitude, l'incompréhension et l'abandon des hommes pour lesquels il allait offrir sa propre vie.
A cet instant, raconte la légende, le petit oiseau, le seul être qui ne s'était pas éloigné du mont, se posa, affligé, aux pieds du Maître, compatissant à sa douleur.
Le regard anxieux, haletant, le petit oiseau sembla dire à son bien-aimé "Swami" :
- Ne pleurez pas, divin "Swami". Les hommes ne comprennent pas encore votre cantique, mais, quand vous rejoindrez le Père, les oiseaux répéteront votre message partout sur la terre. L'humanité se réveillera un jour et vivra, toute entière, votre Évangile, atteignant enfin l'Harmonie et la Paix des Bienheureux.
Le "Swami", après avoir incliné la tête, regarda le petit oiseau. Les yeux du Maître étaient tout noyés de larmes. L'une d'elles tomba, frémissante, sur le bec de l'oiseau.
C'est ce jour, raconte la légende, que la nature, émue, entendit pour la première fois le chant du rossignol. "